©Giada Connestari / Imagéo / ONF

La grande Histoire des forêts (#Episode 4) - L'ordonnance de Colbert en 1669 : la gestion forestière en forêt de Tronçais

De Louis XIV à nos jours, retour sur les grandes campagnes de plantations forestières en France. Certains grands travaux de boisement ont eu des objectifs économiques dès le XVIIe siècle, pour alimenter notamment la Marine en bois de qualité. Aujourd'hui, la tonnellerie bénéficie de ces investissements historiques.

Vers 1660, les regards se tournent vers le potentiel économique du bois, qui motive à son tour bon nombre de reboisements. Si dans l’Allier, la réputation de la forêt domaniale de Tronçais n’est plus à faire, elle rayonne en France et à l’international pour ses hauts chênes rectilignes et leurs majestueux bois très prisés en tonnellerie. Mais si l’on remonte trois siècles en arrière, quand Colbert réalise un inventaire des forêts royales pour renforcer la Marine nationale, Tronçais est découvert en piteux état. En cause : une utilisation abusive de la forêt par les paysans.

Parcelle de chênes sessiles en forêt de Tronçais. - ©Giada Connestari / ONF

C’est là qu’intervient l’ordonnance de 1669 souhaitée par Colbert pour garantir des mesures de protection du périmètre de la forêt couplées à une grande campagne de reboisement. On commence à délimiter la forêt en posant des bornes et les forestiers évaluent la ressource et posent les premières bases pour reconstituer la forêt de Tronçais.

Les efforts de Colbert ont permis de préserver la partie centrale de la forêt, mais l’activité du XVIIIe siècle de l’industrie des forges de Tronçais et la poursuite du pâturage par les habitants, ont réduit ce travail à néant.

Plus tard en 1832, le maître des Eaux et Forêts Joseph Louis de Buffévent constate cet échec. Pour y remédier, il instaure de nouvelles méthodes de coupe et de reboisement plus respectueuses de l’écosystème forestier. En un peu moins de cinq ans, il lance un vaste programme de reboisement de la forêt. Ses nouvelles techniques en ont fait le père de l’aménagement moderne de la forêt de Tronçais.

Le résultat de cette sylviculture durable sur plusieurs générations de forestiers a donné vie au massif que l’on connaît aujourd’hui, un peuplement mêlant des essences de chênes (81%), de hêtre (10%) et de pin sylvestre (7%). Et si, au XXIe siècle, la production de bois est toujours un enjeu majeur au sein de Tronçais, il s’accorde pleinement avec les missions de protection de la biodiversité et d’accueil du public. En pratiquant une gestion durable et raisonnée, l’équilibre forestier est ainsi préservé.

Aujourd’hui, si quelques futaies majestueuses subsistent de l’époque de Colbert, la majorité des peuplements encore en place sont l'œuvre de Buffévent.

Découvrez l'histoire de Tronçais sur le sentier Colbert :

Le massif domanial de Tronçais illustre parfaitement la façon dont l’Homme est capable de façonner une forêt. C’est un travail minutieux et précautionneux que nous poursuivons depuis des centaines d’années. Notre mission est de transmettre aux générations futures des bois aussi remarquables que ceux qui arrivent à maturité aujourd’hui et que nous avons l’honneur de valoriser.

Loïc Nicolas, ancien responsable ONF de l’unité territoriale de Tronçais.

La chênaie régulière, un choix de prestige

Située au cœur de la chênaie ligérienne, terroir qui présente une forte identité, la forêt domaniale de Tronçais est exemplaire pour sa gestion en futaie régulière. Cette technique sylvicole, qui consiste à faire pousser ensemble des arbres d’âges proches, est le secret de la production de bois de chêne. Mais pas n'importe lequel : le chêne à grain fin. Grâce à des éclaircies très régulières, la largeur des cernes reste fine et les arbres s’élancent pour atteindre des hauteurs majestueuses. Un véritable savoir-faire à la française, prisé par les tonneliers et les mérandiers !

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