Etang des Maffrais – ©Anne Recoules / ONF

Forêt domaniale de Rennes, le massif-mosaïque

C’est la forêt du samedi matin et du dimanche après-midi. Celle où l’on emmène les enfants et les grands-parents. Où l’on promène son chien. Où l’on fait du VTT avec les copains. A une dizaine de kilomètres de la capitale bretonne, c’est une forêt périurbaine facile à arpenter. On n’a pas peur de s’y perdre. Mais si l’on emprunte les petits sentiers, on peut s’attendre à de jolies surprises…

"Ce qui me plaît dans cette forêt, c’est qu'elle n’est pas monotone. Au niveau des paysages, on ne s’ennuie pas parce que c’est très, très diversifié, on va jouer entre feuillus et résineux." Queue de cheval et cheveux gris, Olivier Hillairet, technicien forestier d'Ille-et-Villaine, est intarissable sur cette forêt. Plus de vingt ans à en prendre soin, forcément, ça aide à en connaître les spécificités...

Alors que l’on sillonne le massif, on comprend en un clin d’œil ce que ce forestier passionné veut dire. Les essences se succèdent, au fil des allées : chênes, hêtres, pins sylvestres, pins laricio... Elles sont larges, ces allées. Et longues. De grandes lignes, souvent droites, presque plates, où les habitants du coin aiment courir, pédaler et se balader, seuls ou en famille. Ici, il n’est pas rare de croiser poussettes et trottinettes. Cette forêt n’a pas de reliefs particulier - le point culminant est à 107 mètres ! - ce qui la rend facile d’accès. Quand on s’aventure un peu, on découvre des petits chemins boisés, tantôt dégagés, tantôt couverts. On est surpris par l’alternance entre futaies de feuillus et zones de résineux. Parfois sans transition. Il suffit de tourner la tête pour avoir soudain l’impression d’être dans un autre massif !

A droite, une futaie de feuillus. A gauche, des résineux. A droite, du vert clair et un chemin ombragé. A gauche, des aiguilles vert foncé et de la lumière. La raison de cette diversité, elle est dans la géomorphologie du massif, typique du sol très argileux du bassin rennais : "Tout dépend de cette dalle d’argile. Dans la futaie feuillue, la zone de prospection des racines est beaucoup plus profonde parce que la dalle d’argile est beaucoup plus en profondeur. Avec les résineux, on sent nettement que la dalle d’argile fait comme une dalle de béton impénétrable - aussi bien pour l’eau que pour les racines - elle est beaucoup moins profonde" nous explique Olivier Hillairet. Deux parcelles, deux ambiances.

La balade se poursuit dans l’un des coins préférés d’Olivier. Du côté des berges du Caleuvre, l’un des ruisseaux qui coulent dans le massif. "C’est un endroit que j’adore ! C’est un ruisseau vraiment forestier qui se trouve en sous-bois, qui a un cachet assez particulier, bucolique. Vous êtes en pleine forêt, il y a de magnifiques vieux arbres, vous avez le bruit de l’eau… pour moi, ça procure une émotion d’apaisement". Le Caleuvre commence à retrouver ses virages, perdus lors du remembrement des années 50-70. A l’époque, on l’avait rendu rectiligne afin qu’il s’écoule plus rapidement. Sauf qu’aujourd’hui, son débit est trop élevé. Résultat : il s’assèche en été et la faune ne peut s’y installer. L’ONF a donc décidé de lui rendre ses courbes : "On est en train de faire des travaux de méandrage pour lui faire courir un maximum de virages, pour retenir l’eau un maximum dans le massif". Et conserver ainsi un peu plus d’humidité.

Deux marcheuses en forêt de Rennes - ©Anne Recoules / ONF

Dès l’instant qu’on est en forêt, on fait de la sylvothérapie. Vous respirez un air relativement pur. Quand on est dans des massifs comme celui-là, on respire de l’oxygène à pleins poumons ! Et puis il y a les couleurs : marron et vert, ce sont des couleurs apaisantes. Et les arbres dégagent aussi des ions positifs...

Olivier Hillairet, forestier de l’ONF en Ille-et-Vilaine

En parlant d’eau... Olivier nous emmène voir La Minette. Non, ce n’est pas une race de félin aquatique adepte des forêts bretonnes, mais un système de canalisation construit pas l’homme en 1880. Jusqu’en 2013, il alimentait en eau tout le nord de Rennes. Son nom vient de la rivière d’où l’ouvrage partait, à une vingtaine de kilomètres au nord-est. Dans le sud du massif, on peut encore voir un tronçon aérien de l’aqueduc en pierres maçonnées. L’eau n’y coule plus mais la nature ayant horreur du vide, les lieux ont vite été réinvestis par des chauve-souris. A l’abri, au frais, à l’ombre et au calme, elles ont trouvé le refuge parfait.

Les chiroptères se plaisent en forêt de Rennes, où l’on a pu observer plusieurs espèces de chauve-souris remarquables, dont le Grand murin. Les oiseaux aussi. Environ 64 espèces différentes ont été recensées : Engoulevent d’Europe (que l’on voit peu en Bretagne), Pic noir, Pic mar, quelques couples d’Autour des palombes... Si on baisse les yeux, on peut déceler des traces de passage de sangliers ou de chevreuils. Mais ici, pas de cerfs. Le massif est trop proche de la ville. Si l’on baisse les yeux encore plus bas, on peut parfois croiser la route d’un scarabée violet et... d’une  mygale. Pas de panique, l’Atypus affinis n’est pas plus grosse qu’un ongle ! Et il faut être spécialiste en la matière pour la rencontrer ; la bête est timide et vit sous terre...

Le saviez-vous ?

Le massif entier est classé en Zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type 2 et 383,40 hectares sont classés en Zone Natura 2000.

Canalisation de La Minette - ©Anne Recoules / ONF

Ce que l’on voit bien par contre, ce sont les fougères, le houx et la molinie bleue, qui poussent abondamment. Et les champignons ? Pour eux, c’est le paradis ! Cèpes en début d’automne, girolles en fin d’été, chanterelles grises l’hiver sous les pins : il y a de quoi remplir son panier une bonne partie de l’année. Quelques arbres remarquables jalonnent la forêt, dont le chêne bicentenaire du Placis-Vert à l’écorce encore parsemée d’éclats d’obus. Ou le chêne de Mi-Forêt, à deux pas de la maison forestière. L’un des préférés d’Olivier : "Il a quatre troncs et pour moi, ce sont les quatre piliers de la forêt : l’arbre, la faune, la flore et l’humain...".

S’il fallait ajouter un cinquième pilier, ce serait l’eau. Tant pour les ruisseaux que pour l’Etang des Maffrais et celui de Saint-Roux, au nord-ouest du massif, où l’on peut parfois croiser quelques Martin-pêcheurs, oiseau à l'éclair bleu vif. Et aussi pour la zone de tourbières, un peu plus haut. Trois hectares très bien cachés où cohabitent, les pieds dans l’eau, droséras à feuilles rondes, grassettes du Portugal, linaigrettes, sphaignes ou encore callunes. Pour y aller, il faut bien s’équiper.

Même règle dans le massif forestier de Rennes, dont la variété incite à choisir avec soin sa monture ou ses chaussures pour les balades : trottinette et baskets si l’on reste dans les grandes allées, VTT ou bottes aux pieds si l’on aime s’aventurer !

Infos pratiques

Les sentiers

  • 80 kilomètres de sentiers pédestres dont le GR®39 (Mont Saint-Michel-Guérande) qui traverse la forêt, ainsi que 10 sentiers PR® ;
  • 135 kilomètres de sentiers VTT ;
  • 60 km de parcours balisés pour l’équitation ;
  • sentier écologique sur la sauvegarde de la nature ( 2km - départ de l’Étang des Maffrais) ;
  • parcours Santé (1,7 km - départ du parking CRAPA de Liffré, à côté du campus Pierre Rouzel).

Accès

  • à 15 minutes au nord de Rennes : prendre l’A84, sortie 26 "Liffré-Centre / La Bouëxière", puis direction la D27 et suivre les panneaux "Mi-Forêt".

Principaux parkings

  • mi-forêt, en plein cœur du massif forestier ;
  • les Juteauderies (Thorigné-Fouillard) ;
  • étang des Maffrais ;
  • Liffré (à côté du campus Pierre Rouzel).

La forêt de Rennes en détails

Plan de travail 108
Essences principales 54 % feuillus (chêne, hêtre et autres)
Plan de travail 132
Essences principales 46 % résineux (pin sylvestre surtout, pin laricio, pin maritime)
PICTOS web
Surface 3000 hectares (+grande forêt domaniale de Bretagne)
Précipitations Environ 600 mm de pluie/an

Un peu d'histoire

Du temps de l’Empire romain, le domaine forestier s’étendait jusqu’à Condate (ancien nom de Rennes). Les premiers défrichements commencent et se poursuivent au Moyen Age. Jusqu’en 1491, le domaine forestier appartient au Duché de Bretagne. Il devient forêt royale en 1491 avec le mariage d’Anne de Bretagne et Charles VIII, alors roi de France. En 1720, un incendie détruit le centre de Rennes et beaucoup d’arbres sont prélevés pour sa reconstruction. En 1756, 300 hectares du domaine disparaissent dans un autre incendie. La ressource s’appauvrit. Et ce, d’autant plus que nombre d’artisans (sabotiers, tonneliers, charpentiers…) exploitent le massif. Au XIXe siècle, Napoléon lance un programme de reboisement des forêts françaises. Les artisans n’ont plus droit d’y travailler et le massif revêt, petit à petit, son aspect d’aujourd’hui.

Au niveau du carrefour de la Grande Lune, vous pourrez croiser un regroupement de pierres,  parfois appelé ensemble mégalithique du Banc de la Lune. Pas de gros menhirs mais quelques blocs de pierre, dont l’origine reste aujourd’hui encore incertaine...

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