Battre la fougère aigle pour protéger les jeunes arbres

Avez-vous déjà entendu parler des "bâtonneurs" de fougères ? Les forestiers de l'ONF battent, à l’aide d’une machine spécifique, cette plante très dynamique pour permettre aux jeunes arbres de pousser et à la forêt de grandir. Eclairage à la suite d'une démonstration réalisée en forêt de Chinon, en présence des équipes de la ville de Tours.

Dans de nombreuses forêts, comme en forêt domaniale de Chinon, la fougère aigle (Pteridium aquilinum) pullule. Cette plante hyper-présente en Indre-et-Loire peut atteindre plus de 2,5 mètres de hauteur et gêner les jeunes arbres dans leur croissance. Au printemps, elle submerge les semis et les plants, les prive de lumière et d'eau. En hiver, elle s'effondre sur eux, ce qui peut les casser, les déformer ou les tuer par étouffement.

Face à cette plante vivace, les forestiers de l'Office national des forêts (ONF) disposent d'une technique méconnue : le bâtonnage. Il s'agit de battre la fougère à la machine, sur la partie haute de la plante (crosse) qui produit de nouvelles feuilles et lui permet de grandir.

En images, le bâtonnage du 8 juin 2020 en forêt domaniale de Chinon

Pourquoi une telle méthode ? "Il ne faut surtout pas couper la fougère aigle à la base, sinon elle repousse en quelques semaines. Bâtonner permet de casser la tige de cette plante, qui vivote alors et cesse de se développer en hauteur, sans la tuer et sans abimer les jeunes pousses des arbres", résume Sebastien Buferne, responsable de l'unité territoriale d'Indre-et-Loire à l'ONF.

Les travaux pratiqués sont sans danger pour les fougères. Ils assurent une diversité biologique, en permettant à diverses essences forestières de pousser. Sur une surface forestière concernée, le bâtonnage est en général pratiqué une fois par an durant trois ans, le temps que les jeunes arbres poussent et dépassent les fougères.

Une technique optimale contre les fougères aigles

Identifié comme le meilleur moyen, le bâtonnage mécanique permet d'éviter l'utilisation de l'alusame, une molécule chimique efficace et peu couteuse contre la fougère aigle. "Cette solution n'est pas envisageable en forêt publique. L'ONF a abandonné l'utilisation de tous produits phytosanitaires depuis octobre 2019", témoigne Sébastien Buferne. Quant au bâtonnage manuel, s’il était pratiqué jusque dans les années 60, il n’est plus d’usage aujourd’hui pour des raisons de pénibilité du travail et d’efficacité économique.  

Ce 8 juin 2020, nous avons réalisé une démonstration pour la ville de Tours en forêt de Chinon sur une parcelle de pins. Comment fonctionne le bâtonnage ? Comment dégager la fougère qui nuit à la régénération ? Notre objectif était de montrer la pertinence de cette technique d’un point de vue écologique et économique.

Sébastien Buferne, responsable de l'unité territoriale d'Indre-et-Loire à l'ONF.

Pour bâtonner, une machine bien particulière…

En mars 2013, la réunion d’un groupe de travail sur la problématique de la fougère aigle à Compiègne (Oise) a donné lieu à des échanges entre le directeur de la société Grenier-Franco, des gestionnaires forestiers et des représentants de l’ONF. Ces échanges ont fait germer l’idée de développer un bâtonneur mécanique pour imiter les gestes réalisés autrefois par les ouvriers forestiers, avec le même résultat qualitatif et une meilleure productivité journalière moyenne. Pour arriver au bâtonneur de fougère mécanisé, il faudra 3 années et 3 prototypes à la société Grenier-Franco. Aujourd’hui, l’ONF utilise régulièrement ce mécanisme qui a prouvé son efficacité.

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