Visite d'un site Protehyl – ©DSF

Bilan des suivis 2022 sur les sites Protehyl

Les principaux éléments de la campagne de suivi de l'année 2022.

L’objectif du projet Protehyl est de tester les propriétés répulsives du Methyl-Salicylate (MeSa) contre l’hylobe dans les plantations de résineux, et plus particulièrement de douglas. En effet le douglas est l’essence résineuse la plus touchée par les attaques d’hylobe sur le territoire métropolitain avec environ 31% des plantations attaquées chaque année.

Les sites Protehyl, au nombre de six sont les suivant :

  • Oise : en forêt domaniale de Laigue, géré et suivi par l’ONF ;
  • Meuse : en forêt communale de Romagne-sous-Montfaucon, géré par l’ONF et suivi par l’INRAE ;
  • Morvan : en forêt de Prenet, géré par la Société forestière de la caisse de dépôts et suivi par l’INRAE ;
  • Corrèze : en forêt de Pérols-sur-Vézère, géré par CFBL et suivi par le FCBA ;
  • Tarn : en forêt de Peyre-Plantade, géré par Alliance Forêts Bois et suivi par l’INRAE ;
  • Ardenne belge : en forêt de Louftémont suivi par le CDAF.

A l’issue de la première année de suivi des sites expérimentaux, l’année 2022 a été marquée par des sécheresses printanières et un été caniculaire qui ont impacté les plantations à l’échelle nationale. Sur les parcelles suivies dans le cadre du projet Protehyl nous avons observé des intensités d’attaques d’hylobes très variables d’un site à l’autre. Les taux de reprises des douglas à la fin de la saison de végétations sont eux aussi hétérogènes.

Kenza Bakouri, Chargée de mission au pôle Renfor pour les projets autour de l'hylobe

Analyse et bilan des données collectées suite à la première campagne de plantation

Premiers résultats des différentes modalités testés - ©Kenza Bakouri / INRAE
Dégâts d'hylobes importants sur un jeune sujet - ©INRAE

Le graphique ci-dessus représente les Intensités d’attaques (I) que nous avons relevées sur les différentes modalités. Il s’agit de l’analyse des données de printemps des sites de l’Oise, de la Meuse et de la Belgique, et des données d’automne du site du Morvan (les sites pour lesquels les modalités installées sont comparables).

Les modalités « Mélange pied à pied verruqueux » et « Sol nu mélange pied à pied verruqueux » ont des niveaux d’attaques similaires aux modalités « insecticide », notre témoin traité. Il semblerait que les modalités où les bouleaux sont proches des douglas se dégagent. Les bouleaux jaunes auraient un effet bien moins marqué que les bouleaux verruqueux. Ce dernier point est à nuancer car les bouleaux jaunes ont globalement moins bien repris que les bouleaux verruqueux.

La modalité « Sol nu » ne présente pas des résultats si différents du témoin et on ne remarque pas d’effet additif en présence de bouleaux.

La modalité « Diffusion », est assez décevante. Les facteurs bloquants seraient la technologie de diffusion en matière de largage et de stabilité au cours du temps, mais aussi la densité de diffuseurs sur les parcelles et donc leur proximité avec les douglas.

La modalité « Paillage » est la plus atteinte par les attaques d’hylobes.

Ces premières tendances sont néanmoins à nuancer car les sites avec les plus fortes attaques ne sont pas pris en compte ici pour des raisons des particularités de certaines installations.

Recalibrations

Différentes recalibrations ont été décidées après concertation entre les partenaires :

  • Oise

Abandon du suivi de 2 blocs car les taux de mortalité des douglas était trop élevé (autour de 70%). L’intensité d’attaque (I) sur l’ensemble du site était de 0.125 en juin, soit une intensité moyenne.

  • Meuse

Très faible intensité d’attaque (I=0) malgré quelques plants attaqués et une présence d’hylobes avérée sur le site grâce aux pièges. Très bonne reprise des douglas avec un taux de reprise de 87% sur l’ensemble de la parcelle. La mortalité des bouleaux a cependant été très forte (76% tous bouleaux confondus) suite aux épisodes de chaleurs extrêmes et au dégagement qui a dû être réalisé sur ce site. Au printemps 2023, de nouveaux bouleaux verruqueux et jaunes ont été replantés pour permettre de continuer le suivi des modalités en mélange.

  • Morvan

Ce site a la particularité d’avoir été planté en juin 2022 et non en mars-avril. Attaque d’intensité forte (I=0.36) sur l’ensemble du site, avec 30% de mortalité des douglas. Le suivi de cette parcelle continue en l’état en 2023.

  • Corrèze

La plantation n’a pas été préparée de la même façon que sur les autres parcelles puisqu’il n’était pas possible de réaliser de broyage en plein. Abandon d’un bloc car le taux de mortalité des douglas y est de 60%. L’intensité d’attaque sur l’ensemble du site en juin était forte (I=0.37).

  • Tarn

Ce site a subi une attaque d’hylobe d’une ampleur et d’une rapidité qui nous a pris de court. Certaines modalités n’ont même pas eu le temps d’être entièrement mises en place avant l’attaque des hylobes. Abandon du suivi du site dans sa totalité car le taux de mortalité douglas est de 87% dont 70% dû à l’hylobe.

  • Ardenne belge

Intensité d’attaque faible (I=0.05) et bon taux de reprise des douglas (90%). Le suivi du site continue en l’état en 2023.

Méthode de piégeage « Push & Pull »

Schéma théorique du push & pull - ©Kenza Bakouri / INRAE

Diffusion devient « Push & Pull » : en 2023 nous abandonnons la modalité diffusion pour la remplacer par un test de mise en application de la méthode de piégeage « Push & Pull ». Elle consiste à conférer un effet répulsif à une petite portion de la plantation (push, « pousser » en anglais) tout en attirant les ravageurs (pull, « tirer » en anglais) sur des zones où ils peuvent être piégés.

Les diffuseurs de MeSa sont maintenant installés sur des piquets collés aux plants de douglas ce qui nous permettra de tester si la proximité à un impact sur leur efficacité. 6 pièges sont disposés sur le pourtour de la zone de mesure de cette modalité afin de capter les hylobes qui s’en éloignent. Il s’agit d’une méthode de lutte contre les ravageurs utilisée en agriculture mais jamais testée en contexte forestier

Modalité paillage

Plants de Douglas avec modalité paillage - ©INRAE

Dans l’objectif de tester les propriétés répulsives du MeSa sous différentes formes, l’idée d’installer un paillage de broyat de bouleaux au pied des plants semblait intéressante. Cette modalité consistait à broyer de jeunes bouleaux, en entier au printemps pour disposer leurs copeaux au pied de douglas. De cette façon, les molécules de MeSa émises seraient au plus près des plants à protéger.

Mise en oeuvre sur le terrain

Dans la réalité, cette modalité a été compliqué à mettre en place. En effet il a été plus compliqué et/ou plus couteux que prévu de réaliser le broyage des bouleaux à proximité des différents sites Protehyl, du fait des contextes de certains massifs ou encore de la disponibilité en personnel et en matériel. Par exemple pour la Meuse et le Morvan, le broyat de bouleaux a dû être réalisé dans l’Oise avant d’être livré sur les sites à plusieurs centaines de km. Enfin une fois sur place, la mise en place de ce paillage au pied des plants n’a pas été de tout repos malgré l’utilisation d’un quad, notamment sur les sites dont certaines parties sont difficilement accessibles. Ces difficultés en font une modalité non transposable à la gestion en l’état.

Abandon de la modalité paillage

Il n’existe pas de filière de production de broyat de bouleaux, il a donc été compliqué d’approvisionner l’ensemble des sites en 2022. De plus l’application de paillage au pied des plants est chronophage et peut s’avérer complexe en fonction de l’accessibilité des parcelles. En plus de ces contraintes logistiques, les résultats de la 1ère année présentent cette méthode comme moins efficace que les autres et de loin. Sur le terrain nous nous sommes aperçus que ce paillage pouvait servir de cachette à bon nombre d’insectes et donc certainement à l’hylobe.

Pour l’ensemble de ces raisons nous avons décidé d’abandonner le suivi de cette modalité pour la suite du projet.