©Romain Perrot

Face à l'érosion marine : restaurer les dunes grises un enjeu de biodiversité

Habitat d’intérêt communautaire, la dune grise est prise en étau entre l’avancée de la forêt et l’érosion marine, un risque en nette augmentation avec le changement climatique. Cet habitat est très long à se mettre en place et malheureusement sa dégradation, elle, est de plus en plus rapide. Il est donc important de maintenir voire d’accompagner son extension. Aujourd’hui une dizaine de chantiers de restauration de la dune grise sont en cours sur la côte atlantique. À Quiberon, l’ONF a lancé des travaux d’envergure pour la restauration de la plus grande dune grise d’un seul tenant d’Europe. En Charente-Maritime, les travaux pour éviter que la forêt plonge dans l'océan profite aussi à la biodiversité.

A Quiberon : faire reculer la forêt pour sauver l'une des plus grande dune grise d'un seul tenant d'Europe

Les pins plantés pour limiter la progression du sable après la Seconde Guerre mondiale ont colonisé peu à peu la dune grise en forêt domaniale de Quiberon, l’une des plus grande d’un seul tenant d’Europe. Cette frange entre la plage et la forêt est la zone la plus riche en terme de biodiversité. L’enlèvement des pins colonisateurs en début d'année 2023 sonne le départ d’un reconquête de la biodiversité associée à ce milieu très riche. Ces travaux ont pu être réalisés grâce au soutien financier du Plan de Relance Biodiversité.

Une surface occupée par les pins multipliée par 5 en 30 ans !

Les pins maritimes plantés après la Seconde Guerre mondiale à l’Est de la départementale et autour du musée de la Chouannerie, ont essaimé dans la dune grise. Les semis naturels se sont développés librement pendant une trentaine d’année. Entre 1991 et nos jours, la surface occupée par les pins a été multipliée par 5, passant de 1,9 ha à 9,5ha ! Ces pins maritimes de moins de trente ans nuisent aux zones humides arrière-dunaires et à la dune grise, un habitat prioritaire Natura 2000 protégé à l’échelle européenne. Peu à peu ils modifient l’équilibre de l’écosystème de la dune grise en y apportant de la matière organique (aiguilles, bois mort) et de l’ombrage. Ils assèchent les zones humides arrière-dunaires et étouffent la flore caractéristique de la dune grise dont certaines espèces sont très rares et protégées comme l’Omphalodes du littoral ou la Linaire des sables. La dune grise, c’est le réservoir de biodiversité dunaire… De plus, la modification du milieu qu’ils entraînent, permet à d’autres espèces de s’implanter comme le baccharis hamilifolia, espèce invasive échappée des jardins.

L’abattage des pins permettra de retrouver le paysage avant les années 1990. Ces travaux vont laisser temporairement des trouées et des traces de passage d’engin mais pas à pas, les dunes, et la végétation qui les accompagnent, reprendront leur place. Les cheminements des engins forestiers sont limités à des tracés définis, sur des chemins existants afin de ne pas créer d’autres perturbations et dans les zones humides, les mouvements de sol permettront vraisemblablement à de la flore pionnière remarquable de s’exprimer. Les ornières en se remplissant d’eau recréent des mares artificielles.

Des études et suivis naturalistes seront effectués pour suivre l’évolution du milieu, un état des lieux a déjà été relevé en avril 2022 avant les travaux. On estime qu’il faudra 2 à 3 ans avant que les plantes recolonisent la dune grise et 4 à 5 ans pour que l’équilibre de son écosystème soit retrouvé.

Pins coupés et mis en tas avant leur enlèvement - ©Mickael Ouisse

En Charente-Maritime : l'érosion marine fait tomber la forêt dans l'océan

En forêt des Combots, comme sur l’Ile d’Oléron ou la pointe de la Coubre, l’érosion y est si intense que les arbres de la forêt basculent régulièrement sur la plage et dans l’océan. Les arbres et leurs racines ne peuvent rien face à la force des vagues et du vent combinés. Sur ces sites, contrairement à d’autres zones de la côte, l’absence de haut-fond sableux ne permet ni d’atténuer l’effet érosif de la houle, ni le réengraissement de la plage en sable après les tempêtes hivernales. Ainsi la plage peut reculer de 10 à 30 mètres chaque année, les hivers calmes, et grignote peu à peu la forêt.

Les travaux de sécurisation profitent aussi à la biodiversité de la dune grise

Des opérations de déboisements sont menés régulièrement avant les grandes tempêtes d’équinoxes (là où le vent est le plus violent sur la côte). Les arbres en bord de falaise dunaire déstabilisés après les tempêtes peuvent basculer à tout moment. Les déambulations sur la plage deviennent donc dangereuses avec des chutes d’arbres imprévisibles. Il faut de plus éviter que ces arbres partent à l’eau, où ils vont présenter des dangers pour la navigation et mettre en péril les activités aquacoles et ostréicoles. Traiter la frange forestière directement exposée est le seul choix responsable au regard de l’expérience de l’ONF acquise dans la gestion de ce risque naturel. Par ailleurs on peut observer un effet bénéfique à cette mise en lumière de la frange côtière : la réinstallation d’une véritable et précieuse végétation dunaire : Giroflée des sables, liseron des dunes et oyat recolonisent la zone déboisée grâce à l’ensoleillement, comme en témoigne les secteurs stabilisés.

 

La mise en lumière va permettre à la végétation dunaire de réapparaître comme le liseron des sables - ©J. Favennec-ONF

L'érosion marine : un phénomène naturel accentué par le changement climatique

L’érosion marine est un phénomène naturel causé par les marées, la houle, les courants, et les intempéries qui, avec le temps, provoquent le déplacement du sable vers l’océan. Par endroit sur la côte Atlantique, l’érosion y est si intense que les arbres de la forêt basculent régulièrement sur la plage et dans l’océan. Les arbres et leurs racines ne peuvent rien face à la force des vagues et du vent combinés. L’élévation du niveau de l’océan dû au réchauffement climatique et un déficit chronique en sable génèrent des points d’érosion majeur.

Mieux comprendre le phénomène d'érosion marine en vidéo

©ONF