Ciné-débat à Blois : dérèglement climatique et impacts sur les forêts domaniales de Loir-et-Cher

Le 12 octobre dernier, une centaine de personnes s’est réunie à Blois pour assister à la projection du film Ma forêt va craquer et débattre avec les spécialistes. Situation locale, avenir de la forêt, stratégies mises en œuvre : retour sur les informations partagées par l’ONF !

« Nos forêts vont-elles disparaître ? » Voilà la question que la communauté d'agglomération de Blois, Agglopolys, a souhaité aborder.

Au programme tout d’abord, la diffusion du film documentaire Ma forêt va craquer, une coproduction France Télévisions et Christophe Cocherie. Réalisé il y a deux ans en Centre-Val de Loire, il présente celles et ceux qui luttent contre la menace que fait peser le réchauffement climatique sur les forêts françaises et sur leur biodiversité.

©France Télévisions, Christophe Cocherie

Quels effets sur les forêts ?

©Agglopolys

Pour bien comprendre ce phénomène et bien s'y préparer, Agglopolys s’est entourée de spécialistes du sujet : le Service départemental d'incendie et de secours (SDIS), l’Office national des forêts (ONF) et le Centre national de la propriété forestière (CNPF).
Les présentations et débats se sont poursuivis jusqu’à 22h30 devant une salle comble, avec de nombreuses questions pertinentes du public.

Yann Vandebeulque, responsable de l’unité territoriale ONF de Loir-et-Cher, a apporté un éclairage sur les conséquences du dérèglement climatique pour les forêts domaniales de Blois et de Russy qui sont gérées par son équipe.

Les étés chauds et secs se succèdent et la température augmente. Les précipitations restent stables pour le moment mais moins réparties sur l’année, avec de longs étés arides et des hivers très arrosés. Ces sécheresses à répétition ont déjà un impact sur la santé des arbres et sur le risque incendie. Avec une hausse estimée de + 2 °C de la température moyenne annuelle, l’été que l’on a connu en 2022 pourrait devenir la norme d’ici 30 à 50 ans.

Yann Vandebeulque, responsable ONF Loir-et-Cher

En plus du risque accru d'incendies, la hausse des températures provoque une augmentation de la transpiration des arbres, qui puisent davantage d’eau dans le sol pour y pallier. « Pour le chêne par exemple, + 1 °C de température moyenne sur un mois de la saison de végétation, c’est un besoin supplémentaire de 40 mm de précipitations » précise le forestier.
Quand le manque de pluie se prolonge et que le réservoir en eau du sol tombe à 40% et moins, les arbres souffrent de stress hydrique. Leurs feuilles flétrissent, roussissent puis tombent. Affaiblis, ils deviennent plus vulnérables aux ravageurs et maladies.
Par ailleurs, si l'évapotranspiration est plus importante que ce que l'arbre peut puiser d'eau dans le sol, des bulles d'air se forment dans ses canaux et empêchent la conduction de l'eau, créant une embolie souvent mortelle.
Ces sécheresses constituent donc un véritable risque pour les forêts.

Bilan et stratégie de l’ONF

À l’heure actuelle, les forestiers ne constatent heureusement pas de dépérissements d’ampleur dans les forêts domaniales de Blois et de Russy. Mais ils assistent néanmoins à des dépérissements diffus dans le chêne et le pin sylvestre, avec parfois des accélérations au gré des sécheresses estivales successives.
« Qu’on le veuille ou non la forêt va changer. Le réchauffement climatique va indéniablement provoquer une sélection naturelle à laquelle peu d’espèces pourront survivre » annonce Yann Vandebeulque, « Si rien n’est fait on pourrait s’orienter vers un phénomène de savanisation, avec des arbres épars et de grandes zones de landes couvertes de graminées et de fougères ».

Sachant que 300 000 hectares de forêts publiques françaises sont déjà touchés par le dépérissement, l’ONF résiste et multiplie les actions pour maintenir une forêt résiliente et assurer le couvert forestier de demain.
S’appuyant sur des recherches, analyses des sols et outils de diagnostic, les forestiers mène des tests dans des îlots d’avenir et adaptent leur gestion au profit d’une forêt mosaïque.

 « Notre objectif est de diversifier les modes de sylviculture à l’échelle des forêts mais aussi les essences d’arbres à l’échelle des parcelles, ce qui rend les peuplements et leurs écosystèmes plus résistants » explique le responsable de Loir-et-Cher.
Plusieurs provenances ou essences d’avenir ont ainsi été testées et sélectionnées, permettant aux gestionnaires de combiner régénérations naturelles et plantations complémentaires en visant un mélange de résineux et de feuillus plus résistants aux sécheresses, dont des fruitiers favorables à la biodiversité.

« Le changement climatique est rapide et la forêt ne pourra pas s’adapter assez vite d’elle-même » conclut finalement Yann Vandebeulque. « C’est un défi sans précédent. Il y aura des succès, il y aura des échecs, mais nous mettrons tout en œuvre pour y faire face et assurer l’avenir des forêts publiques ».

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