Le retour du débardage à Cheval en Haute-Savoie

En février, l’Office national des forêts a piloté un chantier particulier dans les Bois de Vernaz, à Gaillard (Haute-Savoie), en collaboration avec la commune.

L’objectif : réaliser une coupe sanitaire sur des frênes sévèrement atteints par la chalarose, tout en limitant l’impact sur les sols et sur la biodiversité. Pour cela, une méthode rare mais vertueuse a été privilégiée : le débardage à cheval.

Située à la frontière suisse, cette forêt alluviale de 6 hectares, très fréquentée par les riverains, est classée zone Natura 2000 et protégée par un arrêté de biotope. Les contraintes environnementales et sociales y sont fortes, d’autant que le site est traversé quotidiennement par des promeneurs, des familles, des enfants. Dans ce contexte, l’ONF a proposé à la commune de recourir à la traction animale, une technique douce, adaptée aux forêts sensibles et aux zones périurbaines.

Durant 10 jours, deux chevaux de trait, Max et Jupiter (races Ardennais et Trait du Nord), ont extrait 100 m³ de bois sans mécanisation lourde. Leur intervention a permis de réduire le tassement des sols, de limiter les nuisances sonores et de préserver l’intégrité des sentiers, y compris celui qui deviendra prochainement un parcours confort dans le cadre d’un projet “ForêtSport ”.

À l’issue de l’exploitation, aucune remise en état n’a été nécessaire, preuve de la légèreté de l’intervention. Les techniciens forestiers ont sélectionné la parcelle avec soin, en tenant compte de la régénération naturelle et des exigences du site.

Ce chantier avait plusieurs objectifs :

• Assurer la sécurité du public en retirant les frênes malades ;
• Préserver les sols et la biodiversité ;
• Expliquer le chantier aux riverains, pour une meilleure compréhension de la gestion durable de la forêt ;
• Valoriser le bois en circuits courts.

Ces objectifs ont été atteints. Le bois extrait a été valorisé à hauteur de :

• 65 m³ pour du sciage, dans le cadre d’un partenariat avec l’entreprise Opinel, qui utilise du bois français durable pour ses couteaux ;
• 35 m³ en bois de chauffage.
  
  

Au-delà de la gestion forestière, le chantier a permis une action de sensibilisation réussie auprès du public. Deux animations ont été organisées sur site, avec la participation de deux classes (CE1 et CE2) et du centre de loisirs local, soit 80 enfants au total. Ils ont pu découvrir le travail du cheval en forêt, le rôle de l’ONF et les enjeux d’une gestion durable.

Les retours des habitants ont été très positifs : la présence des chevaux, leur calme et leur efficacité ont suscité la curiosité et la sympathie, facilitant la compréhension d’un chantier pourtant délicat.

Ce chantier illustre parfaitement les bénéfices de la traction animale, notamment dans les zones naturelles protégées et les forêts urbaines. Pourtant, cette pratique est aujourd’hui en voie de disparition. On ne recense qu’une quinzaine d’opérateurs qualifiés en France, malgré ses avantages écologiques et sociaux.

En 2025, en plus du chantier de Gaillard, d’autres interventions sont prévues sur le Salève et à proximité de Thonon-les-Bains.

Ces chantiers ne remplaceront pas les engins mécanisés sur l’ensemble du territoire, mais ils apportent une réponse concrète à certaines contraintes locales, avec une forte valeur d’exemple. Ils démontrent aussi que la gestion durable des forêts peut s’appuyer sur des savoir-faire anciens, à condition de leur redonner les moyens d’exister.