Restauration de la tourbière de la Salesse dans le Tarn

A la demande de l’Entente pour l’Eau du Bassin Adour-Garonne, l’Office national des forêts a réalisé des travaux pour restaurer la tourbière de la Salesse, sur la commune de Murat-sur-Vèbre. Objectif : renforcer la dynamique de fonctionnement hydrologique de la tourbière et favoriser la biodiversité associée.

Du fait d’un climat d’influence montagnarde (températures fraîches et forte pluviométrie), l’amont du bassin versant de l’Agout (rivière, affluent du Tarn) est propice à la formation et au maintien de zones humides. A ce jour, plus de 1 878 zones humides couvrant 4 360 ha sont recensées sur le département du Tarn : elles se concentrent majoritairement sur les monts de Lacaune et le massif de la Montagne Noire.

Ces zones humides sont principalement des prairies humides (2 154 ha) et des tourbières et milieux associés (1 462 ha). Les tourbières du bassin versant sont en limite de leur aire de répartition, ce qui interroge sur leur devenir dans le contexte du changement climatique.

Des milieux fragiles et menacés

Cette tourbière, grande de 11,7 hectares, classée en Espace Naturel Sensible (ENS) par le département du Tarn, présente plusieurs intérêts. En effet, en tant que tête de bassin versant de la Vèbre, elle joue un rôle de régulation hydrologique, d'épuration de l'eau et de stockage du carbone au sein  de sa tourbe. 

A la suite de l'arrêt des pratiques pastorales ancestrales, elle a fait l'objet de travaux de drainage réalisés lors d'opérations de plantations de résineux dans les années 1970. Le site a alors perdu une part de son caractère humide et a été progressivement envahi par une végétation moins hygrophile comme la calune, la bruyère et le saule. 

La restauration de cette zone humide ne peut se faire qu'en inversant les effets produits par le drainage.

Réhumidifier la tourbière

L’objectif des travaux est de ralentir les écoulements d’eau qui transitent dans la zone humide via le réseau de fossés afin de rehausser le niveau de la nappe d’eau et ainsi réennoyer les zones tourbeuses en cours de minéralisation et de déshydratation. Ceci s’est fait par l’obturation des fossés drainants. Une série d’ouvrages ont été disposés en travers des fossés à neutraliser. Des bourrelets de tourbe se sont formés de part et d’autre de ces ouvrages de sorte à rediriger les écoulements vers l’intérieur de la tourbière.

L’agropastoralisme, présent sur ce secteur, joue aussi un rôle important en permettant le maintien de milieux ouverts qui sont autant de ressources fourragères.

Description de la technique utilisée

Cette méthode, déjà mise en œuvre sur les tourbières en forêt domaniale de l’Aubrac à l’automne 2021, montre déjà des effets bénéfiques sur le milieu.

Quentin GIRY, chef de projet spécialiste - Bureau d'études Sud Occitanie

L’ONF n'est pas intervenu sur les écoulements classés « cours d’eau » et les travaux ont été réalisés à l’automne pour limiter au maximum les impacts des travaux sur la faune et la flore du site.

Résultats attendus

Ces travaux de réhumidification de la tourbière devraient favoriser la réapparition d’une végétation turfigène (qui contribue à la formation de tourbe), limiter la minéralisation de la tourbe et donc contribuer à préserver le stock de carbone accumulé dans les sols de la zone humide pendant plusieurs milliers d’années.

De nombreuses compétences de l'ONF ont été mises en œuvre pour ce projet

Partenaires du projet

C’est le Syndicat Mixte du Bassin de l’Agout en partenariat avec l’Office national des forêts, qui porte le projet "Gestion Durable des zones humides dans le bassin versant de l’Agout", avec l’appui technique du bureau d’études ScopSagne et de la Chambre d’agriculture du Tarn.

Ce projet a été retenu lors de l’appel à projet "restauration des zones humides de tête de bassin versant (2021-2024)" lancé par l’Entente pour l’Eau Adour-Garonne pour améliorer nos connaissances du fonctionnement hydrologique des zones humides à l’échelle du bassin versant de l’Agout.

Historique

1948
Environ un tiers de la superficie du bassin versant de la zone humide est recouvert par des arbres feuillus. Les deux tiers restants sont occupés par des milieux ouverts, probablement pâturés, et par la zone humide. Le tracé des écoulements semble naturel.

A l’époque, le lit du Rec Escur ne se dessine que dans la partie basse de la zone humide, environ 70 m en contrebas de la route forestière qui longe le nord de la Sagne.
1950-1970
Aucun changement dans l’occupation du sol n’est à signaler
1971
L’ONF réalise des plantations sur une vingtaine d’hectares et de nouvelles routes forestières sont créées. Ces travaux sont complétés dans les années suivantes par des actions de drainage : un réseau d’environ 2 300 mètres linéaires de fossés est réalisé́. Il est possible que ces fossés aient été creusés dans l’axe de ruissellements préférentiels.

Le lit du Rec Escur est quand à lui surcreusé et prolongé jusqu’à rejoindre la route forestière située au nord de la Sagne. Des dépôts des matériaux, extraits lors du creusement des fossés et du Rec, sont également observables le long des axes d’écoulements. Les fossés et le lit du Rec Escur confluent en trois points : à l’amont de la zone humide, dans sa partie médiane et à son exutoire.
2004
Depuis 2004, la zone humide est pâturée plusieurs mois par an par un troupeau de bovin de race Galloways
2006
Des éoliennes sont implantées en limite du bassin versant.
Aujourd'hui
La quasi-intégralité du bassin versant de la Sagne est occupé́ par des milieux boisés : des peuplements de feuillus et des résineux issus des plantations arrivés à maturité́.

La zone humide est également en voie de colonisation par les ligneux (saules notamment), qui se développent en partie dans le sillon des fossés et du Rec Escur.

A travers cette mission, l’ONF a su proposer une technique de restauration peu commune et a adapté ce protocole sur d’autres sites en fonction de la problématique du milieu.

Financement du projet