Des peuplements forestiers, au patrimoine génétique remarquable, nouvellement classés pour fournir les graines des arbres de demain

Le lieu où vont être récoltées les graines forestières pouvant former les futurs arbres de demain n’est pas choisi au hasard. En forêt domaniale de Dourdan, les équipes de l’ONF et d'INRAE se sont rendues sur le terrain afin d’identifier si de nouveaux peuplements de chênes pouvaient faire l’objet de futures récoltes de glands. Et également pour rechercher de nouveaux peuplements de fruitiers pour lesquels la demande de graines est de plus en plus forte en lien avec la volonté des forestiers de mélanger plusieurs essences dont celles favorables à la biodiversité.

Une histoire de génétique

Pour fournir la nouvelle génération d’arbres, le patrimoine génétique des essences forestières est une donnée essentielle. Aujourd’hui, il est de plus en plus indispensable de perpétuer la forêt en l’accompagnant grâce à la plantation en mélange d’essences forestières dont les qualités génétiques sont considérées comme potentiellement résistantes au climat de demain. Afin de de pérenniser le cycle naturel et la résilience des peuplements forestiers, il est primordial que les peuplements sélectionnés ne soient pas issus d’hybridation. Pour répondre à ces critères, les peuplements doivent être purs, d’une qualité supérieure et avoir la capacité de fructifier.

En effet, face au changement climatique, la résilience de la forêt est un des objectifs premiers des forestiers. Certaines essences sont ainsi ciblées et recherchées afin de pouvoir, par la suite, récolter leurs graines pour produire les jeunes plants de demain.

©Justine Parmentier / ONF

Comment se déroule la sélection

Les forestiers sur le terrain examinent les peuplements présentant les plus grandes qualités de résilience aux aléas climatiques afin de prélever les graines des spécimens les plus intéressants et fournir les pépinières en fruits forestiers qui produiront les nouvelles générations d’arbres avant leur plantation en forêt.

Les équipes locales de l’Office, ont un rôle important à jouer dans cette récolte car ce sont elles qui, dans un premier temps, identifient les peuplements à proposer en fonction de plusieurs critères :

  • leur état sanitaire actuel
  • leur croissance (sur la base des connaissances acquises)
  • leurs fructifications passées

Par la suite pour certaines essences comme le chêne sessile, un processus de classement est enclenché en lien avec les équipes de scientifiques d'INRAE.

La migration assistée, c'est quoi ?

©Justine Parmentier / ONF

Depuis des siècles, les essences forestières migrent naturellement à la faveur du climat, de la capacité des graines à se déplacer elle-même et de certaines espèces d’oiseaux.

Les forestiers ont toujours travaillé en faveur de la régénération naturelle des arbres, c’est-à-dire qu’ils s’emploient à favoriser l’implantation des jeunes arbres issues des graines des arbres voisins.

Aujourd’hui, le réchauffement climatique accélère le fait que certaines essences ne se trouvent plus adaptées aux contextes locaux. Dans ce type de cas précis et au vu de la rapidité du changement climatique, la régénération naturelle ne suffit plus et les forestiers sont contraints de l’accompagner par la plantation de nouvelles essences plus adaptées, dont le contexte d’origine est plus en adéquation avec les prévisions météorologiques futures (basées entre autre sur les données du GIEC).

Les forestiers procèdent à ce que l’on appelle la migration assistée : ils importent des essences forestières déjà présentes dans le sud de la France, ou venue d’autres pays (sapin d’Espagne, calocèdre, séquoia toujours vert, chêne faginé du Portugal...) et les implantent par plantation dans les zones touchées par des crises sanitaires en lien avec les conséquences du réchauffement climatique.

 

Une décision à prendre sur le terrain

Afin de sélectionner les meilleures graines possibles, il faut donc étudier directement sur les terrains les futurs arbres-parents afin de vérifier qu’ils puissent fournir des semences adéquates à la recherche des forestiers. S’enclenche ainsi un processus de sélection afin de pouvoir certifier que le peuplement correspond aux critères.

Tout d’abord, les pépinières informent les forestiers de leur besoin. Une fois la commande transmise, la recherche s’enclenche ! Les forestiers vont parcourir les peuplements déjà disponibles puis parcourir les forêts à la recherche de nouvelles parcelles. Les forestiers de terrain vont proposer des peuplements qu’ils trouvent appropriés et qui pourraient aussi fournir une quantité suffisante (calcul fait au vu du nombre d’arbres de la même essence présente sur la même parcelle), pour ne pas mettre en péril la régénération locale de la forêt qui sera prélevée

Après cette première phase, deux cas de figures sont possibles au vu de l’essence proposée :

©Justine Parmentier / ONF

Pour les peuplements de chênes

Aujourd’hui, les graines issues de chênes sessiles sont particulièrement attendues au vu de ses capacités de résistance au changement climatique notamment aux périodes de sécheresse. Pour pouvoir ramasser les graines des chênes, le protocole est très règlementé et contrôlé afin de limiter au maximum la récolte d’espèces hybrides.

Cette année en forêt domaniale de Dourdan, dont la vitalité des peuplements et leur croissance sont particulièrement bonnes, de nouvelles parcelles forestières ont été proposées au classement.   

Plus de 200 hectares ont été ainsi examinés par les équipes d'INRAE afin de vérifier que les chênes proposés étaient bien de la qualité recherchée.  

Ce sont les yeux rivés sur les houppiers, mais aussi sur les troncs et en cas de doute sur les glands des années passées, que les personnes d’INRAE procèdent à la vérification de la présence de chênes sessiles tout en signalant la présence d’essences voisines telles que le chêne pédonculé. Ce travail est crucial afin de mettre en évidence les lieux où les glandeurs pourront venir approvisionner les pépinières.

Lors de plusieurs journées, les forestiers et INRAE ont ainsi parcouru la forêt à la recherche de ces précieuses graines qui permettront à l’avenir de participer au renouvellement de la forêt de demain.

Les peuplements de fruitiers

Les fruitiers sont des essences de plus en plus recherchées afin de diversifier les peuplements dans une même parcelle. En effet, afin de s’adapter au changement climatique, les forestiers plantent en mélange 3 ou 4 essences différentes sur une même zone tout en favorisant aussi en parallèle les arbres qui s’implanteront naturellement. Les fruitiers sont une véritable piste pour continuer de rendre nos forêts plus résistantes tout en continuant d’introduire des essences forestières importantes et déjà présentes dans de multiples massifs.

Les forestiers partent également à la recherche de peuplements pouvant répondre à la demande de plus en plus grande des pépinières. Cette année, les forestiers ont repéré des groupes d’individus dans les forêts domaniale de Rambouillet et de l’Isle Adam. Pour les arbres fruitiers, le processus de classement est moins complexe et ne nécessite pas de certification. Les forestiers ont ainsi eux-mêmes proposés des peuplements notamment d’Alisier torminal, d’Érable champêtre ou encore de Cormier.

Penser la forêt de demain !

©Justine Parmentier / ONF

Les peuplements d’aujourd’hui fournissent ainsi les arbres de demain sur les parcelles locales mais aussi ailleurs en fonction des besoins. La qualité de leur patrimoine génétique est primordiale afin de pouvoir avoir des arbres résistants et pérenniser la forêt pour les siècles à venir. Quand la forêt ne peut se régénérer naturellement, les forestiers leur donnent un petit coup de pouce grâce à la plantation !

C’est ainsi, que le ramassage de graines est aujourd’hui de plus en plus nécessaire au vu du contexte sanitaire des peuplements qui se dégradent et le besoin qui en découle de les remplacer par des peuplements plus variés et résistants au climat actuel et futur.

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