©Elodie de Vreyer / ONF

La forêt de Perseigne, une belle discrète

Au milieu du bassin parisien, la forêt de Perseigne (Sarthe) offre un charmant paysage. Des vallons, des collines parcourues par de nombreux ruisseaux, un belvédère, les vestiges de bâtiments monastiques et d'une ligne ferroviaire jamais exploitée... Autant d'attractions pour une forêt peu fréquentée, mais riche en biodiversité.

C'est une forêt de vallons et de collines. Une coulée de verdure où passent une vingtaine de ruisseaux. À la limite entre la Sarthe et l'Orne, la forêt de Perseigne s'étend sur 5 143 hectares. Peu fréquentée par les Sarthois, qui lui préfèrent souvent Bercé au sud du département, Perseigne offre pourtant une belle diversité d'essences et de paysages. La forêt, célébrée dans deux ouvrages parus en 2021, fait partie du Parc naturel régional Normandie Maine.

"À l'Est, nous sommes sur les bordures du massif armoricain, vallonnées voire pentues, avec des chênes de moyenne qualité, des hêtres et des sapins", explique Jérôme Dodier, technicien forestier à l'Office national des forêts (ONF) sur le secteur. Sur ce sol pauvre de grès et de schiste, les myrtilles, mousses et résineux donnent un petit air des Vosges.

L'ouest de la forêt est plus plat, avec des sols plus riches, propices à la pousse de hêtres et de chênes de haute qualité. Par leur absence de nœuds, ces derniers servent notamment à fabriquer des tonneaux très appréciés des prestigieuses maisons de cognacs et autres armagnacs.

À l'automne, les visiteurs viennent à Perseigne écouter le brame du cerf, largement représenté de même que le chevreuil. Plus de 70 espèces d'oiseaux ont élu domicile ici : des pics, des rapaces, dont l'impressionnant autour des palombes, d'une envergure d'1,20 mètre.

Perseigne abrite aussi depuis 2011 un nid de cigognes noires. Forestiers et ornithologues surveillent attentivement ces oiseaux craintifs, inscrits sur la liste rouge des espèces menacées. Visiteurs, passez votre chemin : s'approcher des cigognes, c'est risquer l'abandon du nid et des petits.

La forêt de Perseigne en chiffres

Défi climatique pour la forêt de production

Perseigne est depuis des siècles une forêt de production. Les chênes sessiles occupent aujourd'hui 50% de la superficie du massif, suivis par le hêtre (30%) et les résineux (20%) comme le pin sylvestre, le pin laricio et le sapin pectiné.

Pour produire du chêne de belle qualité, les forestiers de l'ONF surveillent de près les essences alentours. À commencer par le hêtre, qui malgré ses nombreux usages est moins recherché que le chêne. Tous deux sont souvent associés. "Le chêne a besoin de lumière et le hêtre tolère l'ombre. Ce dernier poussant plus tôt et plus haut, nous veillons par des coupes ou des travaux à ce qu'il ne nuise pas au chêne", explique Jérôme Dodier.

Le forestier s'inquiète de l'avenir des hêtraies elles-mêmes, le hêtre supportant mal le réchauffement climatique et la raréfaction de l'eau. À Perseigne, les épiceas, amateurs d'humidité, sont les premières victimes de ces changements.

Dans la partie ouest de la forêt ces résineux exhibent leurs branches mortes, attaquées en quelques mois par les scolytes, ces insectes qui prolifèrent sur des arbres affaiblis par les sécheresses répétées. Les arbres seront coupés et remplacés par des essences plus adaptées au sol et au futur réchauffement climatique, comme les pins.

Des chênes, des feuillus précieux (alisier, merisier) et quelques séquoias vont aussi être plantés. Dans cette partie dénudée de la forêt, des petites parcelles sous étroite surveillance accueillent également des chênes du Sud-ouest, jugés plus résistants à la sécheresse. Ce sont les îlots d'avenir, un dispositif déployé par l'ONF pour déterminer les essences qui composeront les forêts de demain.

Le belvédère, attraction majeure

Un peu de tourisme aussi... On accède au belvédère de la forêt de Perseigne depuis le carrefour des Trois ponts, où l'on peut se détendre autour d'un calme ruisseau et découvrir l'ossature d'une mouronnière, cet abri recouvert de fougères qui accueillait les charbonniers jusqu'aux années 1940.

On y parvient après avoir traversé la vallée d'Enfer, très prisée des cyclistes. La course Laurent Brochard, un enfant du pays, emprunte chaque année ces lacets qui emmènent jusqu'au point culminant de la Sarthe, à 349 mètres d'altitude.

Sur ce modeste sommet occupé par les Allemands pendant la guerre, des tables de pique-nique, une aire de jeux et une tyrolienne attendent les familles. En saison, on peut aussi monter les nombreuses marches du belvédère qui offre un panorama à 360° sur le Saosnois et la plaine d’Alençon.

Une forêt de mares et ruisseaux

L'eau n'est jamais très loin dans la forêt de Perseigne, qui bénéficie d'une pluviométrie relativement généreuse. Les nombreux ruisseaux qui donnent naissance à la rivière la Bienne, affluent de la Sarthe, offrent une biodiversité importante.

Ces eaux pures et fraîches où la pêche est interdite sont le domaine de deux espèces protégées, le chabot (un poisson plat) et l'écrevisse à pattes blanches. Ces dernières se font rares hélas, concurrencées par les écrevisses américaines. Les ruisseaux sont aussi le domaine des truites fario et de la lamproie de Planer. Autour de ces points d'eau s'activent de nombreuses espèces de libellules et leurs cousines, les demoiselles.

La préservation de la biodiversité des zones humides est une de nos priorités.

Jérôme Dodier, technicien forestier de l'ONF

En lien avec l'Office français de la biodiversité (OFB), les forestiers mènent notamment des travaux pour assurer la continuité écologique des cours d'eau. Casser des chutes d'eau trop importantes et empêcher l'eau de stagner facilite la circulation et donc la reproduction des poissons.

Un train nommé désir

Au départ du carrefour des Trois ponts, après avoir emprunté la route forestière du Gros Houx, un pont maçonné surgit, cerné de végétation. Il est l'un des vestiges d'un projet un peu fou et jamais achevé, celui de la ligne de chemin de fer Mamers-Alençon.

Souhaité dès 1866 par le conseil municipal de Mamers malgré l'avis négatif de l'État, le chantier ne démarre qu'en 1911. Après la guerre, il est définitivement abandonné, laissant dans le paysage des ouvrages d'art qui n'ont jamais servi. Ainsi le viaduc de Saint-Georges-le-Gaultier, un peu plus loin, a trouvé son utilité en accueillant les adeptes du saut à l'élastique.

Sous les ouvrages qui permettent l'écoulement des ruisseaux en bas du pont, les agents de l'ONF procèdent chaque année à l'inventaire des chauve-souris qui y ont élu domicile, attirées par la température constante qui y règne.

L'abbaye et l'ermite

C'est un haut pan de mur percé de trois ouvertures en ogives. Vers le centre de la forêt, sur un terrain privé, s'élèvent les vestiges de l'abbaye de Perseigne. Ce bâtiment cistercien construit au XIIe siècle a été incendié à la Révolution. Ce n'est pas la seule trace laissée par les moines dans la forêt.

Au centre de la forêt, les historiens locaux ont localisé les vestiges d'un autre site. Il faut faire preuve d'imagination car des pierres taillées et quelques petits pans de murs couverts de végétation sont les seules traces d'un ancien couvent des Minimes.

D'après la légende, le trou profond qu'on y trouve serait le début d'un tunnel menant à l'abbaye de Perseigne, creusé par un ermite qui s'était installé là. Hélas pour les rêveurs, il s'agit d'une glacière, destinée à garder des vivres au frais.

En vidéo, le coin préféré du forestier...

©ONF

Quelques idées de circuit

  • Le parcours "La tête et les jambes" (1h - 1,5 km) au départ du belvédère de Perseigne, permet de découvrir en famille la faune, la flore et l'histoire de la forêt. Un mur d'escalade et une tyrolienne attendent aussi les jeunes aventuriers.
  • Un circuit moyen (2h30 – 8,7 km) de niveau facile propose, au départ de Saint Rigomer-des-Bois, une promenade entre lisière et sous-bois pour découvrir l'ouest du massif et un panorama sur Alençon et la plaine environnante.
  • Un circuit long, de niveau moyen (4h – 13,5 km) propose au départ du belvédère de prolonger la promenade de Perseigne jusqu'à la vallée de l'Enfer.
  • Renseignements :Office de Tourisme Maine Saosnois 50, place Carnot, 72500 Mamers. Tel : 02 43 97 60 63.

Infos pratiques

  • Public

La forêt est adaptée à tous les publics, avec des parcours très faciles et d'autres de niveau moyen.

De nombreux circuits balisés sont proposés aux piétons, VTTistes et cavaliers. Un rocher d'escalade est également aménagé.

  • Accès

La forêt est accessible depuis Neufchâtel-en-Saosnois, Villaines-la-Carelle, Aillières-Beauvoir, Louzes ou Villeneuve-en-Perseigne. La carte IGN 1717SB Alençon-Marolles est en vente à l’office de tourisme Maine Saosnois à Mamers ainsi qu’au belvédère de Perseigne.

  • Services

Plusieurs restaurants existent dans les environs de la forêt, notamment à Neufchâtel-en-Saosnois et Aillières-Beauvoir, qui comptent aussi deux hôtels. Une aire d'accueil des camping-cars est aménagée à La Fresnaye-sur-Chédouet.

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