Protehyl, vers une solution écologique de lutte contre l'hylobe
Les risques liés à l'hylobe
L’hylobe (Hylobius abietis, L.) est le premier ravageur des plantations d’essences résineuses en Europe. Présent partout en France, la prévalence de cet insecte est plus forte dans les régions où prédominent les boisements de conifères plantés, notamment le long d’une diagonale Bordeaux-Metz. L’adulte pond d’avril à juillet sur les souches fraîchement coupées, avec une préférence pour le Pin ou l’Epicéa, notamment dans les coupes rases de résineux. Les larves se développent sous l’écorce des racines pendant 5 à 18 mois, les adultes émergent à la fin de l’été et effectuent un repas de maturation sexuelle sur l’écorce des jeunes plants de conifère avec une préférence pour le Douglas et le Mélèze. Ils hivernent ensuite dans la litière puis ré-émergent au printemps suivant, où ils se nourrissent à nouveau avant de pondre. Ainsi, deux vagues d’attaques sont observées au printemps et en fin d’été. Les morsures des insectes interrompent le flux de sève, réduisent la croissance et peuvent entraîner la mort des plants.
Hylobe se nourrissant d'une jeune rameau
©Inge Van Halder / INRAEQuelques chiffres clés concernant la première année de plantation
+ de 30% des plantations de Douglas concernées par les attaques d'hylobe
400 000 € = montant des regarnis à la suite des mortalités dues à l'hylobe
Le coût des traitements préventifs est estimé entre 750 000 et 1,5 million d'€
On peut considérer que le risque est probablement stable à l'échelle du territoire national depuis plusieurs décennies, mais que l'augmentation brutale des coupes de résineux - et donc de plantations - en Grand Est et Bourgogne-Franche-Comté va engendrer des populations d'hylobe inédites.
L'hylobe touche-t-il tous les résineux de la même manière ?
Essences | Nombre de plants vendus (en millions) | Surface plantée | % de plantations attaquées par l'hylobe |
Pin maritime | 40,7 | 30 860 ha | 6 % |
Douglas | 10,1 | 9 210 ha | 31 % |
Autres résineux | 11,3 | 7 510 ha | 18 % |
Total | 62,1 | 47 580 ha | 21 % |
À ce jour, aucune méthode simple et fiable ne permet de prévoir le niveau de dégâts à court ou à moyen terme.
Quelques photos...
Problématique du projet
Les Bouleaux peuvent-ils protéger les Douglas contre les Hylobes ?
Le projet ProteHyl explore des solutions fondées sur la nature, alternatives à l’usage de produits chimiques. Les scientifiques ont déjà mis en évidence, en laboratoire, les propriétés "anti-ravageur" du Bouleau, qui reposent sur trois mécanismes complémentaires :
- effet répulsif sur les ravageurs ;
- induction des défenses chez les arbres à proximité ;
- attirance pour les prédateurs des ravageurs.
Dans ce projet, c’est grandeur nature que nous testerons différentes techniques forestières pour tirer profit de ces propriétés prometteuses du Bouleau.
Structurellement, la forêt française présente beaucoup de peuplements résineux issus de programmes de boisement de l’après-guerre, arrivant à maturité et devant être renouvelés. Conjoncturellement, la crise sanitaire dans le Grand Est (sécheresse et scolytes) a engendré une exploitation anticipée des plantations d’épicéa en 2019-2020, estimée à l’équivalent de 10 années de récolte, et par suite, un besoin de reconstitution de plus de 60 000 hectares en peuplements résineux. Les perspectives de plantation à court terme sont donc à la hausse mais ces plantations de résineux après coupe, sont particulièrement propices aux attaques d’hylobe.
Le Douglas en quelques chiffres...
estimée en 2035 du fait de son excellente qualité technologique
correspondant à environ 9000 ha plantés
Objectifs du projet
Ce projet poursuit trois ambitions :
- Evaluer rigoureusement, par un réseau expérimental national, l’efficacité de différentes méthodes de protection faisant appel au Bouleau (planté, broyé, sous forme de molécule diffusée).
- Vérifier que ces techniques seront bien acceptées par les propriétaires et entrepreneurs forestiers.
- Intégrer ces techniques dans la stratégie de gestion globale du ravageur (détection, prévention) au niveau des territoires forestiers.
L’ONF s’est engagé fortement et sans ambiguïté sur l’arrêt de l’utilisation des produits phytosanitaires en forêt, ce projet Protehyl illustre le besoin de progrès technique que nécessite un tel engagement, puisque les ravageurs sont toujours aussi menaçants pour l’avenir de la forêt !
Gérer les risques avec des solutions fondées sur la nature, voici la raison d’être de ce travail associant forestiers publics et privés, gestionnaires et pépiniéristes, professionnels et chercheurs.
Quels sont les résultats attendus ?
ProteHyl devrait permettre de mettre au point différentes techniques préventives de lutte contre l’hylobe, être une source d’innovation dans les pratiques forestières.
Le premier résultat attendu est la possibilité de se soustraire à l’usage d’insecticides de synthèse, en les substituant par l’usage de propriétés naturelles d’une plante compagne : le Bouleau.
Nous espérons également identifier les avantages et inconvénients techniques, logistiques, ergonomiques et environnementaux des différentes méthodes pour que les reboiseurs puissent proposer aux propriétaires forestiers des itinéraires de plantation en toute connaissance de cause.
Le fonctionnement du projet et les liens avec le méta-projet hylobe
La situation de crise actuelle, conséquence de l’épidémie de scolytes et des sécheresses estivales de 2018 et 2019 qui ravagent les peuplements d’épicéas et de sapins, vient renforcer l’urgence de recherche de solutions alternatives aux produits chimiques. Dans ce contexte ont émergé plusieurs projets ayant pour objectif de concevoir et évaluer des méthodes de lutte alternatives. Parmi eux, le projet Protéhyl vise à tester l'utilisation de répulsifs d’origine naturelle pour protéger les plantations forestières résineuses contre les dégâts d’hylobe.