©Alain Blumet/ONF

Halloween : peur et phobie des bêtes, apprenons plutôt à mieux les connaître !

Chouettes, chauves-souris, serpents, crapauds, insectes et araignées, ces animaux ont tous en commun de ne pas avoir la cote. A l’occasion d’Halloween, l’Office national des forêts (ONF) vous invite à découvrir ces petites bêtes réputées « effrayantes », pourtant inoffensives la plupart du temps, et le rôle de leur écosystème avec le nôtre !

Crainte, phobie ou indifférence, les "petites bêtes" n’ont définitivement pas le même statut que les cervidés, les écureuils ou les hérissons, qui bénéficient d’un certain capital sympathie beaucoup plus prononcé. Cette crainte subsiste encore aujourd’hui alors que l’homme acquiert de plus en plus de connaissances et a écarté nombre de dangers supposés concernant toutes ces espèces. Mais la peur irrationnelle, parfois ancestrale liée aux dangers réels ou puisée dans les croyances populaires perdurent. Sans oublier l’aspect ou les cris qui alimentent notre angoisse fondée sur certaines histoires d’horreur ancrées dans notre mémoire !

Crapaud sonneur à ventre jaune - ©Vincent Spanneut/ONF

Pourtant en forêt ou autour de nous, toutes les "bêtes", sympathiques ou pas, sont les bienvenues, tissant cette toile du vivant où tout s’imbrique et s’interconnecte. Entre peur de l’homme mais aussi défense de son territoire, de sa progéniture ou de sa vie, l’animal va adapter son comportement comme nous le ferions également, poussé par l’apprentissage, l’expérience, et l’inné.

La chouette et les rapaces nocturnes : des oiseaux de malheur ?

Cachés le jour, en chasse au crépuscule, avec des émissions vocales diverses entre chuintements, hululements ou ronflements, associés au malheur ou aux atmosphères angoissantes d’histoires de fantômes, ils ont engendré la peur jusqu’à très récemment sur notre territoire.

Survolant les cimetières, les ruines et les lieux déserts, la chouette effraie fut pendant longtemps persécutée. Même sort réservé à la chouette hulotte appelée aussi chat huant, aux hiboux ou à la petite chouette chevêche pourtant symbole de sagesse durant l’antiquité et dont le regard perçant savait, selon les dires, sonder l’âme des coupables.

Ces temps paraissent presque révolus, mais il reste encore quelques superstitions tenaces qui alimentent la défiance. Et pourtant saviez-vous que ces petits rapaces jouent un rôle essentiel dans la chaîne écologique, en régulant les populations de petits mammifères ?

Du cœur des clairières et lisières, en passant par les zones humides ou les landes sèches, la forêt est favorable à la présence d’une multitude d’oiseaux grâce à la complexité et la diversité de leurs milieux de vie. Les prédateurs ailés que sont les rapaces profitent des sites de nidification offerts, mieux encore de la richesse des proies (insectes, petits mammifères et autres oiseaux) à leur disposition et selon leurs exigences.

La présence des rapaces en forêt est un bon indicateur de l’état de santé d’un écosystème. Diurnes et nocturnes, plus d’une quinzaine d’espèces telles que les chouettes hulotte, effraie et chevêche ou le hibou moyen-duc nichent en Ile-de-France. Certaines sont timidement de retour avec des effectifs restant toutefois extrêmement fragiles et de ce fait, bénéficient d’une protection intégrale !

Les chauves-souris : des petits vampires, vraiment ?

Vous les voyez peut-être parfois, à la tombée du soir, survolant frénétiquement le ciel ! Les chauves-souris quittent leur cachette et parcourent, grâce à leur ailes membranneuses, la campagne et les espaces urbains autour des plans d’eau.

Ces "demoiselles" d’aspect brun noir et  dormant tête en bas, sont assimilées aux vampires dans de nombreuses régions du monde. Trois espèces qui vivent en Amérique tropicale se nourrissent du sang des oiseaux ou de celui de plus gros animaux comme le bétail. Elles avaient aussi la réputation de s’emmêler dans les cheveux des femmes… Que de légendes et de craintes qui ont alimenté cette peur !

Chez nous, il existe 35 espèces de chauves-souris (protégées). Elles sont d’infatigables chasseresses d’insectes et leur vol rapide et précis leur permet de contourner tous les obstacles. Elles représentent les seuls mammifères volants. En Europe, seules trois familles occupent l'espace aérien avec les vespertilionidés, les rhinolophidés et les molossidés.

En une nuit, une chauve-souris peut consommer près de la moitié de son poids en insectes variés tels que les moustiques, mais aussi des papillons de nuit dont beaucoup d'espèces se développent aux dépens des cultures… Elles représentent donc d'excellents insecticides naturels.

Au cours de l’automne, mâles et femelles se regroupent pour l’accouplement et constituent des réserves de graisse vitales pour affronter les mois d’hibernation. Certaines chauves-souris gagnent alors des sites souterrains tranquilles offrant une température douce et constante (grottes, mines, caves, fissures) tandis que d’autres rechercheront les cavités des arbres ou les interstices dans les maisons. Elles y séjourneront jusqu’au printemps en hibernation. C’est au mois de mai que les petits naissent et sont allaités.

En forêt les arbres à fissures et à cavités servent de refuge à diverses espèces de chauves-souris et les vieux bois, bois morts et îlots de vieillissement font l’objet d’attentions particulières pour la préservation de ces espèces.

Découvrez les missions des forestiers naturalistes de l’ONF !

Les avez-vous déjà croisés en forêt ? Epuisette et appareil photo en main, cuissardes aux jambes, ils réalisent des inventaires sur les reptiles, les champignons, les amphibiens, les végétaux, les mammifères ou encore les oiseaux. Ce sont les forestiers naturalistes de l’ONF dont le rôle est d’observer et étudier la faune et la flore afin de mieux prendre en compte la biodiversité dans la gestion sylvicole. Leurs missions sont à découvrir ici.

Les serpents, tous venimeux ?

Vénérés durant l’Egypte antique, associés à la médecine (la couleuvre d’Esculape, Dieu de la médecine chez les grecs et les romains, est le serpent du caducée) mais aussi associé au péché originel dans le monde judéo-chrétien, considéré comme fourbe, avec une langue bifide (la langue de vipère signifie la médisance et la méchanceté), le serpent revêt différentes peaux selon les cultures.

Rampants, froids, parfois venimeux ou grouillants, méconnus… Il n’en faut pas plus pour que notre serpent traîne encore derrière lui toutes les peurs et les craintes issues de l’imaginaire des hommes.

Et qu’en est-il chez nous ? Les vipères sont venimeuses mais il existe un sérum efficace pour guérir de ses morsures. Les couleuvres subissent les mêmes aprioris, alors qu’elles sont pourtant inoffensives et dépourvues de venin. En France leurs pupilles sont rondes et de grandes écailles régulières ornent le dessus de leur tête. Elles fuient en cas de danger mais peuvent y faire face en sifflant. Il arrive qu’elles se défendent dans quelques cas (si nous mettons le pied dessus par inadvertance par exemple). La morsure peut être blanche, c’est-à-dire sans injection de venin, matière précieuse qui sert à tuer les proies et donc à se nourrir.

En France, il existe une douzaine d’espèces de serpents et quatre sont venimeuses : la vipère de Séoane, la vipère d’Orsinii, la vipère Péliade et la vipère Aspic. Six espèces sont présentes en Ile-de-France : couleuvre à collier, coronelle lisse, couleuvre d’Esculape (localisée), couleuvre vipérine (rare), vipère aspic (localisée) et vipère péliade. Selon leur spécialité, ces serpents peuvent se retrouver dans des milieux plutôt secs ou humides. On les trouve dans les forêts représentant des sites de choix par leur relative tranquillité et la variété des biotopes.

Grands prédateurs, selon l’espèce, de rongeurs, batraciens, poissons, insectes…, ils font partie du maillage du vivant. La loi de 1976 les protège intégralement : la conservation de leurs habitats, les plantations de haies, la préservation de friches, l’interdiction de l’utilisation de pesticides, la connaissance de leurs mœurs sont des actions à saluer pour tenter de maintenir les effectifs. Quelques règles de prudence sont néanmoins bienvenues surtout hors des sentiers pour ne pas les déranger : être bien chaussés et être vigilants en particulier avec des enfants en bas âge.

Les crapauds : plus charmants que l’on croit

Ils faisaient le lien entre les sorcières et le Diable, mijotaient dans le chaudron pour la fabrication des potions. Dotés de verrues, de bave et d’urine aux vertus mortelles, ils symbolisaient les paroles noires et maudites en sortant de la bouche…

Dans le genre Bufo qui englobe environ 200 espèces dans le monde, le Bufo bufo (ou crapaud commun) est, comme son nom l’indique, le crapaud le plus répandu chez nous. De taille moyenne et d’un aspect brun-gris-vert terne avec ses "verrues" sur la peau, il est peu attirant même s’il a la capacité de se changer en "prince charmant", selon les contes de notre enfance !

D’autres sont présents parmi les Bufonidés :

  • Crapaud calamite (Epidalea calamita) en France métropolitaine (hors Corse)
  • Crapaud commun (Bufo bufo) France métropolitaine (hors Corse)
  • Crapaud épineux (Bufo spinosus) Sud de la France
  • Crapaud vert (Bufotes viridis) Extrême nord-est de la France et Corse

Le Crapaud commun est essentiellement terrestre mais il migre vers les mares et les étangs qui l’ont vu naître, entre février et avril selon les endroits, sur des distances de quelques centaines de mètres jusqu’à 1 km afin de se reproduire. Les œufs (de 5000 à 7000 par femelle) sont déposés dans l’eau, attachés les uns aux autres en un cordon. C’est un chasseur de petits insectes, d’araignées, de mille-pattes, de chenilles, de limaces, d’escargots. Plutôt nocturne, il passe sa journée et l’hiver caché dans un terrier ou dans un trou qu’il creuse.

Les crapauds ont une peau couverte de sortes de « verrues » formées par des glandes dites parotoïdes capables de secréter un venin protecteur contre les prédateurs en cas de menace. Ce venin ne traverse pas notre peau, il est donc possible de le manipuler, mais dès lors qu’il entre en contact avec les muqueuses (yeux, bouche), il devient toxique.

Beaucoup de crapauds sont victimes d’accidents avec les voitures lors de leurs migrations nocturnes, c’est pourquoi la mise en place de "crapauducs" par les équipes de forestiers naturalistes de l'ONF, est une action positive pour ces espèces, pour compenser la disparition des zones humides et de ses mares de reproduction. Bien loin de l’image négative qui lui colle à la peau, c’est un allié précieux pour le jardinier de par son rôle de régulateur. Le crapaud est une espèce protégée.

Les insectes ne font pas de mal à une mouche !

Certains ont bonne presse comme les abeilles, les papillons, les cigales ou les coccinelles, d’autres moins comme les moustiques, les guêpes, les frelons, les mouches, les puces, les doryphores, les capricornes ou encore les pucerons. Certains sont parfois dangereux, par leurs piqures ou les maladies qu’ils transportent.

De par leurs formes corporelles ou la relation de certains avec la putréfaction, on les qualifie de ravageurs, nuisibles, d’espèces invasives, dévastatrices ou venimeuses ; elles ne représentent en fait que quelques espèces seulement : moins de 400 espèces sur 2 millions dans le monde.

Qu’ils soient pollinisateurs, nettoyeurs ou prédateurs, leur écosystème vit en inter relation avec le nôtre. Les études scientifiques ont démontré qu’ils étaient des ouvriers indispensables pour notre quotidien. Apprenons donc à dépasser les idées préconçues et à vivre en harmonie avec eux !

L’araignée, la figure maléfique par excellence ? Bien au contraire !

Elle a peut-être la palme d’or de l’animal qui suscite peur, haine et phobie. On la pense noire, velue, venimeuse, avec de longues pattes, fréquentant les lieux sombres, capturant sournoisement ses proies… Elle n'en n'a pas moins suscité l’admiration dans d’autres contrées ou d’autres temps. En Inde, en Afrique, en Sibérie, en Colombie, elle est réputée pour être dotée de pouvoirs divinatoires ou représenter un symbole de l’âme.

A la campagne, elles font partie du décor aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des maisons. En ville, beaucoup de gens n’en connaissent guère qu’une ou deux espèces comme la tégénaire souvent piégée dans les baignoires ou le pholque phalangide, fin, gracile aux pattes immenses, qui se cache sous les meubles et s'installe dans les caves et les greniers. Elles sont certes impressionnantes mais inoffensives et si efficaces pour attraper les insectes indésirables !

Mais, peut-être devrions nous nous pencher sur leur physionomie et leurs mœurs si complexes, afin de réhabiliter "Madame et Monsieur 8 pattes". Voici quelques idées reçues :

Venimeuse ?

70% des 48 700 espèces recensées dans le monde mesurent moins d’1cm. Nous ne sommes pas des proies pour les araignées. 98% des rares morsures sont sans conséquences et l’immense majorité des espèces de nos régions de métropole est inoffensive.

Moche ?

Un céphalothorax portant les 8 pattes, la tête avec généralement de 6 à 8 yeux, 2 chélicères, 2 pédipalpes et un abdomen… Malgré ces caractères propres à toutes les araignées, chaque espèce a ses particularités physiques, couleurs, tailles, son mode de chasse, ses habitudes de reproduction et la variété de ses mœurs est très grande.

Prédatrice ?

Evidement ! Elle se nourrit d’insectes en grande majorité, en utilisant diverses méthodes de chasse (toiles très diversifiées, chasse à la course ou à vue, de jour, de nuit…).

Mangeuse de partenaire ?

Le mode de reproduction des araignées est très varié et intéressant. Les pédipalpes, appendices qui encadrent la bouche, sont renflés et ont une allure de bulbe chez les mâles. Une fois la femelle rencontrée, interviennent, selon les espèces, des rituels, danses, cadeaux permettant au mâle d’introduire ses bulbes dans l’orifice génital de la femelle. Chez beaucoup d’espèces, le mâle, au risque de se faire dévorer, ne s’attarde pas.

Mauvaise mère ?

Si les soins maternels diffèrent en fonction des espèces, les araignées protègent leur ponte. Certaines se contentent de pondre et de regrouper les œufs dans un cocon de soie protecteur et bien caché; d’autres surveillent la naissance en restant à proximité voire en transportant le cocon accroché aux filières ou à l’avant porté par les chélicères. Les jeunes peuvent être accompagnés quelque temps et dans certains cas on observe leur nourrissage : par capture de proies ou production d’œufs non viables dans le cocon qui seront mangés ou c’est la femelle morte qui sera mangée.

L’importance de l’impact des araignées sur la régulation des populations d’insectes n’est plus à démontrer. Leur présence en nombre dans un espace donné témoigne de la bonne santé de celui-ci en démontrant que les insectes sont bien présents. Les araignées sont donc d’excellentes indicatrices de la santé des milieux.

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