©Luc Ackermann / ONF

Les pistes forestières et les impacts sur l'environnement en Guyane

La création de routes et pistes forestières implique un impact systématique sur le milieu naturel. Toutefois, des améliorations techniques et de nouvelles règlementations sont continuellement mises en place pour minimiser ces impacts.

L'ouverture d'une route forestière en Guyane

Cours d'eau illustrant l'érosion après de fortes pluies. - ©Quentin Hazard / ONF

Il existe trois types de routes forestières en Guyane : les routes principales, d’une emprise de 25 mètres et ouvertes de manière permanente, les routes secondaires, d’une largeur de 15 à 20 mètres et d’une durée de vie allant de 5 à 10 ans, et enfin les routes de fin de réseau, d’une emprise de 10 à 15 mètres, utilisées de 2 à 3 ans.

Lors de l’ouverture de ces pistes, l’habitat forestier, initialement sombre, dense et humide, est alors entravé par la création d’un nouveau milieu ensoleillé, exposé à d’importantes variations de température, et dénué de complexité structurelle.

Certaines espèces, animales comme végétales, ont beaucoup de difficulté à franchir cette rupture de l'espace forestier. En particulier, les espèces de petite taille, aux capacités de dispersion limitées, exclusivement arboricoles, ou encore inféodées aux sous-bois, se retrouvent alors cantonnées de part et d'autre de la route créée. Cette isolation des populations de part et d’autre des routes peut conduire à un éloignement génétique et à une baisse de la viabilité des populations, voire à leur extinction complète.

Ce phénomène tend à s’accentuer avec la largeur de la piste : plus une piste est large, plus elle est difficile à traverser ! Toutefois, les spécialistes considèrent qu'en deçà de 50 mètres de large, l'impact est amoindri : c'est la raison du choix de gestion fait par l'ONF d'emprises inférieures à 25 mètres.

Afin d’être carrossables, les sols nouvellement mis à nu doivent être terrassés : ils deviennent alors particulièrement propices à l’érosion. Lors de fortes pluies, des concentration importantes de matières « fines » tendent ainsi à ruisseler depuis les routes vers les cours d’eau traversés par les projets routiers.

Comment réduire ces impacts ?

Une stratégie générale de limitation des impacts des routes forestières et d’évitements souhaitables est systématiquement implémentée au cours de la préparation et de la mise en place des aménagements forestiers sur les sites gérés par l’ONF. Cette stratégie de limitation s’inscrit avant et pendant la réalisation des travaux :

  • lors de la planification de l’exploitation forestière, une étude approfondie de chaque parcelle permet de décider de son classement en série de production, de protection physique et générale des milieux, ou de protection. Ces deux dernières catégories, exclues de l’exploitation, permettent de garantir la protection d’une grande diversité d’habitats et d’espèces remarquables, mais aussi d’éviter les zones à fortes contraintes physiques (berges de fleuves, zones à fortes pentes propices à l’érosion…). Cette mesure permet le maintien de vastes espaces servant de réservoir à la faune et à la flore ;
  • le choix du tracé des pistes s’appuie sur une analyse fine, basée sur des données satellitaires SRTM (Shuttle Radar Topography Mission) ou des données LiDAR (Light Detection And Ranging) qui permettent de connaître finement la topographie et les biotopes associés. L’obtention de ces données permet de localiser et d’éviter les nombreux bas-fonds, cours d’eau et mares, mais aussi de limiter les risques de glissement de terrain ainsi que l’érosion en évitant les zones de forte pente. Le travail des techniciens qui parcourent la totalité du tracé du projet de piste vient ensuite confirmer les hypothèses cartographiques, permettant ainsi d’adapter au besoin le tracé en fonction des « micro-habitats » indétectables par des données satellitaires ou laser (écosystèmes particuliers, espèces protégées et sites archéologiques se trouvant dans l'emprise du projet).
Routes et pistes forestières - imagerie LiDAR - ©ONF

Le réseau routier est conçu « en arête de poisson » et impose qu'il n'existe aucune jonction entre deux extrémités de réseau (absence de boucle), ce qui limite la fragmentation de la forêt, et permet aux espèces sensibles à ce phénomène de continuer à circuler dans la forêt.

Planification création de piste en suivant la topographie - MNT 3D - ©ONF

Le travail d'ouverture des peuplements forestiers et le terrassement de la plateforme sont effectués uniquement en saison sèche, de mi-août à fin novembre. Les sols fragilisés par leur mise à nu sont moins soumis à l'érosion à cette période et peuvent être préparés dans de bonnes conditions.

Enfin, quelques mesures de réduction des impacts sont prescrites en cours de travaux : les très gros arbres en bordure de l'emprise déboisée sont maintenus sur pied avec un bosquet d'accompagnement, créant ainsi une discontinuité dans l'ouverture linéaire de la canopée, favorable au passage de la faune.

Les ponts sont préférés aux aqueducs
pour le franchissement des rivières car ils ne créent pas de rupture du niveau du lit mineur (pas d'effet barrage), ils ne modifient pas ou peu la vitesse d'écoulement (une augmentation de la vitesse peut empêcher certains poissons de franchir l'obstacle) et ne nuisent pas en général à la continuité écologique des cours d'eau.

Pont sur la piste Counamama - ©Xavier Rémongin

Toutes ces mesures d'atténuation des impacts sont traduites en des termes précis et compréhensibles pour tous les opérateurs œuvrant pour la construction des routes, ce qui augmente leur efficacité. Dans le cas général, il s'agit d'un cahier des charges techniques opposé au titulaire des marchés publics de construction des routes et pistes forestières.

Elles sont également argumentées auprès des services de l'administration en charge de l'examen des dossiers d'évaluations environnementales, de déclarations de travaux au titre de la loi sur l'eau et de déclaration des installations classées pour l'environnement (ICPE).

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