©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Vivre la forêt

Repenser l’usage du bois dans les créations d’arts et de design

Du 14 au 25 novembre, la forêt et le bois étaient à l'honneur du nouveau workshop pédagogique organisé par l'école Boulle, grâce au soutien du Maïf social club. Produire des objets en bois tout en respectant le cycle de vie des forêts, tel était l’objectif des étudiants de deuxième année des métiers d'art et du design. Les 19 pièces créées autour du bois vert fourni par l’ONF intégreront ensuite les espaces du Maif social club de Paris.

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Travailler du bois vert et du châtaignier était une grande première pour ces étudiants qui habituellement créent à partir de bois sec et d’essences plus nobles comme le noyer ou plus rares comme le merisier. Les spécificités du bois vert rendent plus complexe tout projet. Tout d’abord son taux d’humidité. Avoisinant les 90%, il oblige à prendre en compte en amont de la conception, les mouvements et déformations du bois qui interviendront pendant la phase de séchage. Également sa fragilité. Le bois vert rime avec outils manuels exclusivement. Les instruments électriques généralement utilisés doivent être oubliés. Morceaux de troncs à fendre, courbure du bois, perçage, assemblage sans colle, ce sont tous les procédés techniques qui doivent être repensés pour s’adapter à ce matériau en mouvement.

Le bois, un matériau d’avenir, allié de la sobriété écologique

Ce bois vert de châtaignier n’avait pas été choisi au hasard. L’objectif de l’ONF en le proposant était de confronter les élèves à la réalité des ressources qui seront disponibles à l’avenir, et à l’empreinte environnementale de leurs créations. Pour parfaire leurs connaissances en matière de ressources disponibles, résilientes et renouvelables, Claire Quinones, responsable commercial bois et service à la Direction Territoriale Centre-Ouest-Aquitaine, est intervenue quelques jours plus tôt pour leur parler de l'évolution des forêts françaises et des usages du bois au cours de l'Histoire, le cycle de la forêt et sa gestion durable.

"Nous sommes très heureux d'avoir participé à cette initiative et d'avoir pu échanger avec ces futurs professionnels sur la gestion raisonnée des forêts publiques françaises et sur l'importance des usages du bois au cours de l'histoire"

Claire Quinonès, forestière à l'ONF

**Le premier morceau de bois vert a été entamé, sonnant le démarrage de la semaine de fabrication du workshop.**
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

**Claire Quinones, ingénieure de l'ONF, expliquant l'évolution des forêts françaises et des usages du bois au cours de l'Histoire, du cycle de la forêt et de la gestion durable.**
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

**Un premier morceau de bois, mais déjà les idées abondent entre toutes les sections mobilisées !**
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

« Travailler avec l'ensemble des sections créé une diversité des points de vue et des idées. Ceux qui étudient dans le design vont avoir une approche plus théorique, alors que nous serons plus dans la pratique » - Solène, étudiante en sculpture sur bois
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

**L'intérêt du bois vert ? Sa malléabilité pour le travailler et le façonner à l'infini !**
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

"C'est intéressant de travailler avec les copeaux et ce que les autres sections ne récupèrent pas. La finesse de certains matériaux nous permet de faire du tissage" - Manon, étudiante en mention espace
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

**Avec les lianes de bois tissés, les morceaux vont être assemblés.**
©Quentin Verdier/ONF

**Les copeaux vont également servir à fabriquer des parties pour un paravent.**
©Anne Bentaieb/ONF

**Assemblage des pièces pour un mobile "revisité" !**
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

**Les petites pièces cylindriques sont assemblée sur un barreau, destiné à être monté sur une chaise.**
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

**"L’intérêt du bois vert est d’être au cœur même de la matière et de voir l’évolution de la forme que prend progressivement le bois " - Sarah, étudiante en conception d'objet.**
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

**"L’avantage de travailler sur du bois vert, c’est l’utilisation de nouveaux outils, plus traditionnels et pas forcément électriques" - Ezéquiel, 19 ans, sculpture sur bois**
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Se reposer et travailler en même temps, c’est désormais possible avec cette création en bois et en cordage. Il suffit d’ajouter la tablette qui vient se positionner sur les accoudoirs pour installer un ordinateur portable. Confortable, malin et esthétique.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

La tente version canopée. Avec cette structure flottante, les enfants se sentent protégés dans leur univers de jeux tout en étant ouvert sur le monde extérieur. Et en plus cette structure suspendue est entièrement recyclable.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Ce paravent déplaçable à l’envie permet de s’isoler seul.e ou à deux, tout en profitant du jeu de lumière offert par le maillage de cordes et de bois. Une œuvre qui devrait vite trouver sa place dans les bibliothèques et espaces de travail.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Bois brulé, sablé, poncé, brut, sculpté… Ce présentoir donne bien plus à voir et à toucher que des documents, laissant découvrir le travail de la main, les différentes structures du bois et la sensualité de cette noble matière.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Le bois et la forêt dans tous leurs états. Cette "matériauthèque" en volume raconte une histoire se déroulant en forêt. Le plus difficile étant de contempler ce module d’exposition sans y toucher.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Voici une table de bureau avec un espace de rangement intégré. Asseyez-vous par terre, installez votre table sur vos jambes, ouvrez le couvercle qui devient instantanément votre tablette de travail !
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Ranger et déployer, tels sont les concepts de cette chaise longue nomade. Entièrement modulable, vous découvrez un système d’éclairage intégré. Ultra légère, elle est aussi 100 % recyclable.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Cette suspension vous fait voyager sous la frondaison. Elle est composée de lambeaux d’écorces, de copeaux d’aubier et de duramen. Par le biais d’un jeu de lumière automnale, cette création dévoile les différentes structures de l’arbre.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Ce paravent de bureau réalisé en bois cousu a pour fonction de créer une séparation visuelle entre deux zones. Le socle en bois creusé et poli, comme sous l’effet de la marée, fait penser au bois flotté.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Cette suspension en bois est un très ingénieux dispositif d’éclairage. Par un mécanisme de cordage que l’on tire, le rouleau en bois tourne sur lui-même pour offrir, une lumière douce ou tamisée, selon les envies.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

**Ce brise vue éventail, entièrement rétractable, protège des regards indiscrets. Composé de différents panneaux réalisés en tissages, il mélange, bois, laine, corde et tissu.**
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Composée de mobiles de différentes longueurs, cette suspension invite à pénétrer dans un lieu. Chaque morceau de bois se tient très près d’un autre sans jamais être en contact, évoquant la timidité des feuilles d’arbres qui évitent de se toucher.
©Tom Hébrard/Ecole Boulle

Concevoir à partir de la matière disponible, un défi pour les métiers d’art

Ce workshop a permis également aux étudiants de repenser totalement leurs méthodes de travail. Habitués à réfléchir sur un projet puis à recenser les matériaux pouvant y correspondre, cette fois-ci, ils avaient pour obligation de partir de la matière pour imaginer et concevoir leur création. Une nouvelle façon de créer, plus écoresponsable.

« Cette façon de faire contraignante au premier abord s’est révélée être un atout », explique Solène, étudiante en 2e année de sculpture sur bois. « Cela nous oblige à repenser l’approche des métiers d’art et de design en faisant appel à notre créativité pour utiliser au maximum les propriétés de chaque matériau ».

Ce qui s’est révélé être une semaine dense, riche et fort appréciée par les étudiants de l’école Boulle, devrait être renouvelé prochainement. En attendant, il sera possible d’admirer les 19 pièces créées par les étudiants lors de ce workshop au Maif social club, à partir du 9 janvier.

Entretien avec Nathalie Fandos, enseignante à l’école Boulle spécialisée en menuiserie en sièges

Qu’est-ce que la menuiserie en sièges ?

C’est une technique traditionnelle qui permet de concevoir tout type de siège (chaise, canapé, fauteuil, etc.) La particularité de ce métier, c’est qu’en plus de découper, façonner et assembler les éléments, le menuisier en sièges dessine et trace les croquis et les plans du futur mobilier.

Quels sont les essences avec lesquelles vous travaillez ?

En menuiserie de siège, nous travaillons essentiellement le noyer. Nous constatons que nous avons de plus en plus de mal à en trouver. En raison du faible volume annuel vendu et du fait que les marchands de bois vendent plutôt du hêtre et du chêne. Dès que l’on recherche d’autres essences, cela devient compliqué.

Quels sont les spécificités des bois travaillés en menuiserie en sièges ?

Dans un métier de structure tel que le nôtre, il faut trouver des éléments de bois qui soient d’une longueur suffisante pour reformer la structure. Il est difficile de composer à partir de chutes. Nous avons essayé de travailler à partir de bois recyclés ou de bois de palette. Mais outre, le fait que le démontage de ces bois est très chronophage, ils sont, en croissant rapidement, malheureusement peu résistant ; c’est le cas des conifères notamment.

Notre volonté à l’avenir est d’apprendre aux futurs étudiants à travailler tous les types d’essences. Et plus spécifiquement des essences issues de productions locales afin de réduire l’empreinte carbone. A terme aussi, nous aimerions prendre en compte la traçabilité des bois sur lesquels nous créons.

Comment percevez-vous vos métiers à l’heure de l’écoconception ?

Avec la nouvelle génération qui arrive et qui est bien plus préoccupée par ces questions, nous sommes en train de repenser nos méthodes de travail. Parmi les étudiants que j’ai, des réflexions intéressantes commencent à émerger. Dans cette promotion par exemple, Célestin a fait le pari du "zéro énergie" dans son travail du bois, si ce n’est l’énergie humaine ou animale pour débarder le tronc.

Cela nous contraint à nous interroger sur ce que représente un métier d’art, le sens et la valeur que ses futurs propriétaires de l’objet réalisé en auront. Avec l'idée aussi que nos créations soient non seulement de qualité, durable dans le temps et écoresponsable.