La Fresque du Climat, l’expérience ludique pour mieux comprendre comment notre quotidien influe sur le climat

Interview de Xavier Bartet, adjoint à la cheffe du département Recherche développement et innovation de l’ONF et animateur de La Fresque du Climat. Cette initiative pédagogique, vertueuse et grand public consiste à sensibiliser chacun d’entre nous sur les aspects pluriels du réchauffement climatique et ses conséquences toutes aussi diverses.

Xavier, qu’est-ce que la Fresque du Climat et comment a-t-elle été conçue ?

Tout est parti de Cédric Ringenbach. Conférencier spécialiste du changement climatique dans les grandes écoles, il assure des cours sur les problématiques énergie-climat. Pour cela, il a souvent recours à des graphiques bien peu intelligibles. Ce manque de lisibilité lui a donné l’idée de transformer ces graphiques en cartes ludiques et pédagogiques, pour garantir une meilleure appropriation des enjeux liés au changement climatique.

Quoi de mieux pour cela qu’un outil participatif qui permet à chacun d’entre nous de comprendre son implication personnelle dans l’accélération du changement climatique ? A l’époque, nous sommes en 2018 et Cédric Ringebach imagine pour cela une fresque sous forme de cartes, comme dans un jeu, que les gens retournent et positionnent au fur et à mesure.

Pour être plus précis, elle illustre les mécanismes de cause à effet de nos quotidiens sur les dérèglements globaux. Voilà pourquoi le jeu aborde des thématiques directement liées à l’activité humaine comme le chauffage, le transport, la construction ou encore l’alimentation. En analysant les conséquences de ces activités à plus grande échelle, on peut alors mieux comprendre des phénomènes tels que la déforestation, la hausse des températures, la sécheresse ou les grandes famines par exemple.

Où se trouve la Fresque physiquement et comment s’anime-t-elle concrètement ?

Elle se trouve là où sont les animateurs. Ces derniers représentent un réseau de 26 000 personnes qui se déploie aujourd’hui dans une cinquantaine de pays.

Les animateurs, formés au préalable, animent des ateliers qui regroupent 6 à 10 personnes. Le jeu se compose de 42 cartes à retourner et à regrouper par lots, selon le sujet abordé.

L’atelier dure trois heures et se déroule en trois séquences. La première consiste à construire la fresque. Une fois qu’elle est construite, vient le temps du partage et du recueil des émotions également car pour certains, les constats révélés sont violents.

C’est important que les gens puissent se confier sur ce qu’ils ont découvert et compris, mais évidemment l’idée n’est pas de tomber dans le catastrophisme. La troisième partie de l’atelier concerne donc la transformation de l’information en action. Avec l’objectif très précis d’agir sur les causes du dérèglement climatique et de voir comment, collectivement, il est possible de rectifier au maximum la trajectoire.

Rapidement, une version numérique de la Fresque du Climat a été conçue, sous forme d’ateliers distanciels ; ce qui a permis de toucher la jeune génération, très l'aise avec ces outils. 

Pour y participer, rien de plus simple, il suffit de faire appels aux animateurs via un calendrier en ligne sur le site de La Fresque du Climat : https://fresqueduclimat.org

Une fois le jeu terminé, comment la Fresque du Climat se révèle-t-elle utile pour la suite, dans la vie de tous les jours ?

Dans un contexte d’éco-anxiété grandissante, la Fresque doit nous pousser à comprendre qu’il ne faut pas rester seul ; au contraire, il faut aller vers le collectif et agir ! Il est important de sensibiliser sur la gravité de ces sujets mais ensuite de transformer l’essai et d’en faire une action de groupe positive et dynamique.

J’ai d’ailleurs vu des gens modifier leur comportement à la suite d’un atelier, notamment au niveau de leur alimentation. Par exemple, une fois qu’on a compris que la production de viande est la cause de l’une des plus grosses émissions de gaz à effet de serre, à savoir le méthane, alors on ralentit significativement sa consommation de bœuf !

La Fresque a-t-elle évolué depuis 2018 ?

Oui ! Depuis, 50 fresques « amies » ont été créées ! Il existe donc la fresque de l’eau, du transport, du numérique... Chacune d’elle se concentre sur un domaine, l’explore et le détaille. Cela permet de comprendre plusieurs sujets plus précisément et de sensibiliser sur différents aspects du réchauffement climatique.

Il existe aussi une fresque de la déforestation mais personnellement, j’attends la fresque de la forêt avec impatience afin d’apporter un éclairage scientifique sur le fonctionnement du cycle des forêts, les services immenses qu’elles rendent à la planète et notamment dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Elle verra bientôt le jour grâce à un dispositif d’expérimentation initié par l’ONF, appelé Graines d’Innovation. Son objectif : favoriser et accompagner des projets innovants en impliquant l’ensemble des collaborateurs de l’Office à proposer des projets en lien avec la forêt. Et dans ce dispositif, les thématiques du climat et du dialogue avec le grand public occupent, sans surprise au vu des enjeux, une place centrale !

Aujourd’hui, il y a l’animation classique de la Fresque du Climat mais il y existe aussi deux actions plus ciblées.

Il y a celle de la « Rentrée climat », là c’est une grande action dans les établissements scolaires où ils font une fresque dans tout l’établissement à laquelle participent tous les élèves, c'est une réussite car parfois, même les plus sceptiques finissent par être convaincus !

Et il y a aussi une action à destination des élus. Là ce sont les communes qui font appel à nous pour que les gens soient formés à cette culture climatique.