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Erosion du littoral : comment agit l'ONF

Le réchauffement climatique accélère l’érosion des dunes. David Rosebery, responsable technique national « Littoral » à l’ONF, revient sur l’évolution du phénomène et les actions mises en place pour préserver ces milieux fragiles.
Entretien avec David Rosebery : "Face aux risques d’érosion, l’ONF protège les dunes et le littoral "

Quels sont les effets du changement climatique sur la dynamique de recul du trait de côte ?

Dans un contexte de changement climatique, on ne maîtrise ni la force, ni la fréquence des aléas qui peuvent menacer les côtes. Ce dont on est à peu près certain, c’est que mécaniquement, la montée du niveau de la mer entraînera inévitablement un recul du trait de côte. L’augmentation de la fréquence et de l’intensité des tempêtes fragilisera aussi les dunes, qui mettent plus de temps à se reconstituer.

Sur les 400 kilomètres de côtes domaniales gérées par l’ONF, de nombreux secteurs sont touchés par l’érosion marine, de manière chronique ou ponctuelle. Si aujourd’hui, les secteurs vulnérables (avec risque de disparition à court terme de la dune littorale) sont minoritaires, ils seront en augmentation. D’où la nécessité pour l’ONF et ses partenaires d’une observation rigoureuse et permanente des phénomènes afin de mieux comprendre les évolutions et savoir anticiper les réponses d’adaptation.

Quels sont les impacts de cette érosion sur la biodiversité ?

L’ONF pratique une gestion conservatoire sur environ 90 000 hectares de forêt dunaire, et l’un des objectifs principaux est de conserver ce patrimoine naturel et sa biodiversité. La disparition des dunes non boisées, interface terre-mer, serait extrêmement préjudiciable à la diversité biologique et paysagère, mais aussi, par la perte de leur rôle d’atténuation des aléas littoraux, aux milieux d’arrière-dune, forestiers pour la plupart.

Concernant la question de l’impact du changement climatique sur la flore dunaire, notre réseau de suivi, qui travaille avec le Conservatoire botanique national sud-Atlantique, ne révèle pas d’évolution du cortège floristique. Ceci peut s’expliquer par le fait que ces plantes sont des pionnières à forte capacité d’adaptation. Cependant, un renforcement durable de l’activité éolienne pourrait modifier considérablement la flore.

Comment l’ONF agit-il pour limiter les effets de l’érosion ?

Nous travaillons avec les processus naturels, et notamment le vent. Ce sont les principes de la « gestion souple » qui cherche à tempérer ou hâter la nature. Côté plage, en période favorable, on améliore le piégeage du sable par la pose de filets brise-vent ou de plantations, pour conforter un « matelas » tampon servant de fusible lors des tempêtes. Sur la dune, on accompagne l’évolution naturelle en maîtrisant la dynamique éolienne (couvertures de branchages, plantations…). Ces mesures sont souvent accompagnées de travaux de mise en défens pour limiter le piétinement. Nous menons également de nombreuses actions de sensibilisation à la biodiversité dunaire.

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Dans les secteurs vulnérables, où le cordon se réduit sous l’effet de l’érosion marine, nous testons désormais une gestion plus adaptative, favorisant la « translation dunaire » (phénomène géomorphologique qui désigne le déplacement des dunes sous l'effet du vent). En effet, les dunes sont mobiles par nature, et cette mobilité peut renforcer leur résilience dans des contextes défavorables. Nous expérimentons cette gestion depuis 2016 en Gironde, notamment à La Teste-de-Buch et Carcans. Les résultats sont encourageants : la dune conserve son stock sableux et continue à jouer son rôle de barrière naturelle face aux aléas littoraux. En 2024, une réflexion a été lancée pour étendre cette méthode à d’autres sites sensibles.

Les dunes sont des milieux mobiles par nature. Il faut s’inspirer de cette dynamique pour assurer leur conservation et préserver leur rôle au service de la nature et des populations

Nous avons également lancé un plan national de gestion des dunes, qui fixera des objectifs de gestion sectorisés en fonction d’indicateurs d’état et d’évolution, à l’échelle des 400 km de dunes domaniales.

Cette approche est prometteuse car elle nous permettra de mieux adapter nos interventions aux spécificités locales. A terme, ce document constituera un guide de référence pour l’action.

Une mission d'intérêt général

L’État a confié une mission d’intérêt général à l’ONF de stabilisation et de protection des dunes littorales domaniales. Ce soutien s’élève à hauteur de deux millions d’euros et permet d’engager de nombreux travaux et des missions d’ingénierie au service de ces espaces naturels.