©ONF

Biodiversité : une étude fascinante révélée par l’ONF en forêt de Bercé

Alors qu’un récent rapport de l’ONU alerte les États sur la perte mondiale de biodiversité, l’Office national des forêts présente une étude scientifique réconfortante en forêt domaniale de Bercé. Au cœur de cette « Forêt d’exception® », un étroit vallon renferme une richesse biologique insoupçonnée. Comment préserver le site sans le mettre sous cloche ? Une réflexion qui a réuni forestiers et naturalistes…

« À l’issue de notre étude, nous avons obtenu des résultats inédits en France sur le plan écologique ». Le 9 mai 2019, Laurent Tillon, chargé de mission faune et biodiversité à l’ONF, a dévoilé aux équipes de l’ONF et aux associations environnementales sarthoises les conclusions d’une étude sur le fonctionnement biologique du Vallon de l’Hermitière. Les enquêtes de terrain témoignent d’un foisonnement important d’espèces inféodées à ce site exceptionnel, situé au cœur de la forêt domaniale de Bercé.

©ONF

Dans cette forêt mondialement connue pour la qualité de ses bois, le vallon de l’Hermitière, d’une surface de 13 hectares seulement, abrite des chênes centenaires classés parmi les plus grands d’Europe. Autre particularité : le site se trouve être un point de passage incontournable en forêt pour toutes les espèces forestières souhaitant transiter du nord au sud du massif. Ce statut de corridor écologique accroît considérablement la richesse du vallon.

Réalisés par les équipes naturalistes de l’ONF (réseaux « mammifères » et « habitat-flore »), plusieurs inventaires ont permis de mettre en lumière l’existence d’importants cortèges bryophytiques (bryophites ou mousses) et licheniques (lichens), ainsi qu’une présence exceptionnelle de chauves-souris. Au total, près d’une vingtaine d’espèces de chauves-souris ont été recensées. Laurent Tillon, spécialiste du petit mammifère volant, ne dissimule pas son étonnement : « Je n’avais encore jamais vu une activité aussi importante. Habituellement en France, les étangs méditerranéens très riches en insectes, concentrent le plus de chauves-souris caractéristiques des lisières en quantité d’individus. À l’Hermitière, on en découvre autant, ce sont des espèces spécialistes de la forêt, essentiellement sur la zone de canopée forestière ! », témoigne le forestier.

©ONF

Comment expliquer cette présence ? Au-delà de la position géographique du site, qui en fait un passage obligé pour les animaux sauvages, la réponse se trouve dans la structure et la morphologie même de ce petit vallon confiné. « On trouve ici des arbres aux dimensions exceptionnelles, avec de nombreuses cavités et fissures, qui sont autant de structures d’accueil pour les chauves-souris en forêt ». Outre la présence du petit mammifère nocturne, les lychens aussi semblent bien s’acclimater au site.

Le diagnostic biologique du site étant aujourd’hui établi, les forestiers de l’ONF peuvent désormais adapter leur sylviculture à l’ensemble des enjeux environnementaux du Vallon de l’Hermitière. Le maintien d’une trame de vieux bois sera notamment renforcé afin d’assurer la présence de micro-habitats indispensables au maintien de nombreuses espèces. « Cette étude est le fruit d’un véritable travail partenarial entre les forestiers de l’ONF et les associations environnementales locales », témoigne le naturaliste. Elle montre aussi que les objectifs de régénération des peuplements, nécessaires pour permettre aux jeunes pousses de grandir et de devenir ces chênes majestueux que les générations futures pourront admirer à leur tour, sont conciliables avec une autre priorité des équipes de l'ONF : la protection de la biodiversité.

Retour sur les origines de cette étude inédite

©ONF

Agés de 180 à 210 ans, les arbres du Vallon de l’Hermitière se trouvent à leur optimum pour se reproduire et fournir des glandées capables d’assurer la relève des jeunes générations. Lorsqu’en 2015, l’ONF décide de procéder à plusieurs coupes d’arbres au sein du vallon afin de garantir le renouvellement des peuplements, les associations naturalistes locales tirent la sonnette d’alarme. « Elles craignaient que les coupes ne fragilisent le caractère biologique exceptionnel du site », explique Laurent Tillon.

C’est dans ce contexte qu’un comité scientifique se met en place et qu’une enquête démarre au printemps 2016 sous l’égide des forestiers naturalistes de l’ONF, en étroite collaboration avec l’association Sarthe Nature Environnement (SNE). Dès 2016, l’ONF modifie son plan de renouvellement du site. Il prévoit que d’ici à 2026, 13 hectares seront régénérés sur plusieurs années par petits bouquets de régénération. Ces coupes diffuses sur l’ensemble du Vallon permettront de limiter les impacts sur la faune et la flore, tout en permettant des percées essentielles à la croissance de la forêt de demain.

Et si l’on ne faisait rien, que se passerait-il ? La tentation est grande de se dire que le plus simple est de ne rien faire et de laisser les arbres mourir seuls. Ce que le public ne sait pas, c’est que dans ce vallon humide et ombragé, le chêne disparaitrait au profit du hêtre. Sa présence est le fruit du travail de plusieurs générations de forestiers qui l’ont favorisé et ont contenu le développement des hêtres. Ces chênes sont aussi majestueux aujourd’hui parce que ces forestiers ont su leur donner les conditions optimum pour se développer. Laisser en l’état ne conduirait pas, par ailleurs, à ce que le paysage et la richesse en biodiversité soient fixés à tout jamais. Encore une fois, c’est le travail du forestier de trouver le bon compromis entre les différents enjeux de gestion durable fixés par l’Etat à l’ONF il y a plus de 50 ans : production de bois, préservation de la biodiversité et accueil du public.

Guylaine Archevêque, Directrice de l’agence ONF Pays de la Loire

À découvrir aussi :