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Volcans de Martinique, Forêt d'Exception® : un écrin de nature sur les pentes du Volcan

Pleinement conscients des richesses de la forêt de la Montagne Pelée et de la forêt des Pitons du Carbet, joyaux d'Outre-mer, les acteurs locaux se sont engagés depuis 2012 dans le projet de labellisation "Forêt d’Exception®.

La forêt des Volcans de Martinique est riche de son histoire humaine et de l'activité économique basée sur la sylviculture du bois précieux du Mahogany. Elle repose sur une biodiversité foisonnante et sa capacité à faire face aux événements climatiques et géologiques parfois bouleversants.

La Montagne Pelée - ©ONF

La forêt des Volcans de Martinique est constituée de la forêt de la Montagne Pelée et de la forêt des Pitons du Carbet. Sur une surface de plus de 9 300 hectares, 5,6% de l'île (58% de la surface des forêts publiques de l'île), ces deux massifs sont les derniers bastions d'une forêt subtropicale humide rescapée des défrichements des siècles antérieurs, protégés par des reliefs escarpés inaccessibles.

Dans un contexte géologique et géographique particulier où les risques naturels sont omniprésents : volcan, cyclones, tempêtes tropicales, sismicité... cette forêt s'adapte aux évolutions constantes du milieu en perpétuel remaniement.

L'activité sylvicole de la forêt des Volcans de Martinique produit le bois précieux du Mahogany. La forêt est très riche en espèces animales et végétales endémiques. Son histoire et la culture créole lui laissent une place particulière dans l'imaginaire culturel.

Tous ces atouts justifient une gestion qui prend garde à l'équilibre entre les aspects sociaux, environnementaux et économiques.

Une forêt tropicale humide à flanc de volcan

Géologiquement, la Martinique est une île relativement jeune dont l'histoire est liée à la tectonique des plaques du bassin caribéen. Le volcan des Pitons du Carbet est constitué de dômes et de coulées épaisses de laves datant de 350 000 ans. A la même époque, au nord de l'île, la Montagne Pelée a émergé, seul volcan encore en activité sur l'île.
Aujourd'hui l'activité volcanique s'est calmée mais reste sous surveillance, et a permis la colonisation végétale et l'installation d'une forêt particulière sur leurs flancs. Le sommet actuel de la Montagne Pelée atteint 1 397 m d'altitude, depuis l'éruption de 1929-1932.

Le massif est influencé par sa situation tropicale. L'année est décomposée en deux grandes saisons : la saison sèche de janvier à juillet, avec une faible pluviométrie et de la chaleur, et l'hivernage d'août à septembre où les perturbations climatiques sont plus importantes. La pluviométrie varie selon l'altitude et les versants. Le brouillard est omniprésent en altitude et donne son nom à la "forêt de nuages" au niveau des sommets.

Forêt tropicale humide, massif de la Montagne Pelée - ©ONF

Il en découle une variété des écosystèmes importante et une large biodiversité présente sur toute l'île. Dans les parties les plus basses du massif se trouve la forêt mésophile (faibles précipitations), aux arbres de grande hauteur et peu de lianes. Puis la forêt hygrophile à plus amples précipitations, une forêt dense humide avec de nombreuses lianes et épiphytes, luxuriante. Enfin la forêt de montagne, où les précipitations sont supérieures à 5 000 mm/an, sur les sommets de la Montagne Pelée et des Pitons du Carbet. Ce sont des zones de vent permanent où la végétation est basse, à partir de 800 m.

Une biodiversité exceptionnelle et protégée

Au sein de ces écosystèmes tropicaux, se distinguent des espaces protégés. La Martinique fait partie d'un des 36 hot spots de biodiversité reconnus à l'échelle mondiale. Elle compte de nombreuses espèces végétales endémiques préservées, c'est-à-dire propres à l'île dans son entier ou aux deux volcans, qui ont pu être mises à mal par les éruptions du début du XXe siècle.

Une faune abondante caractéristique des milieux insulaires trouve refuge dans ces forêts. Parmi ces espèces endémiques on peut citer la Matoutou falaise (Caribena versicolor), le Colibri à tête bleue (Cyanophaia bicolor), l’Allobates chalcopis et le Trigonocéphale (Bothrops lanceolatus).

Des statuts de protection adaptés

Les massifs de Forêt d'Exception® bénéficient de divers outils de protection :

  • le site classé des Versants nord-ouest de la Montagne Pelée (2 100 ha), témoin des paysages originels de la Martinique
  • le site inscrit de la Vallée de la Rivière blanche ou "Cœur Bouliki", inscrit à l'inventaire des sites remarquables depuis 1989
  • le Parc naturel régional de la Martinique (PNRM) créé en 1976, a pour vocation dans le secteur nord, la conservation des milieux, associée à une dimension éducative. Les massifs des Pitons du Carbet et de la Montagne Pelée sont des zones naturelles d'intérêt majeur et des zones paysagères sensibles dans la charte du parc.
  • la réserve biologique intégrale (RBI) de la Montagne Pelée et la RBI des Pitons du Carbet sont situées au cœur du massif. Elles ont pour objectif de conserver le caractère naturel et évolutif de l'ensemble des habitats.

La collectivité territoriale de Martinique (CTM)est nu-propriétaire de la forêt nommée forêt territorialo-domaniale, l'Etat en conservant l'usufruit. L'ONF en assure la gestion.

Une ressource en eau précieuse préservée par la forêt

Rivière blanche (Pitons du Carbet) - ©ONF

La forêt des Volcans, et plus paticulièrement le massif des Pitons du Carbet, est considérée comme le château d‘eau de l'île, dû à sa topographie montagneuse et à la présence de points culminants qui concentrent les précipitations. 90% de la ressource en eau est concentrée dans 7 bassins versants dont 5 alimentés par la forêt des Volcans.

Très tôt dans l'histoire, l'eau des massifs a été utilisée pour alimenter les premières exploitations agricoles, la plupart situées à côté d'une rivière. De nombreux captages sont situés en forêt territorialo-domaniale. Les enjeux d'amélioration de la qualité et de la quantité de la ressource sont pris en compte dans deux contrats de bassin, auxquels les partenaires du projet Forêt d'Exception® sont parties prenantes.

Des paysages emblématiques

Les deux massifs ont une identité paysagère marquée. Si la Montagne Pelée est un cône volcanique perdu dans les nuages à la végétation sommitale rase et rabougrie, les Pitons du Carbet sont couverts d'une forêt tropicale dense humide où lianes et épiphytes se perdent dans la canopée.

La forêt ressource

Les populations amérindiennes ont occupé la forêt de Martinique depuis l'origine. Il est probable qu'elles aient amené du continent américain (centre et sud) des plantes et des arbres, aromatiques et potagers. C'est ainsi par exemple, que le Gommier blanc est utilisé pour faire des pirogues, sa sève pour la médecine...

Le territoire et la forêt abritent également la culture créole. Des esclaves échappés des plantations ou "nègres marrons" durant la période de l'esclavage se réfugiaient en forêt et cultivaient des lopins de terre, devenus aujourd'hui la tradition les jardins créoles.

Si au XVIe siècle, des Européens ont pu débarquer et faire ponctuellement des coupes de bois, c'est à partir de 1635 que les premiers colons s'installent durablement dans l'île, en défrichant pour cultiver tabac, cacao, café et canne à sucre. C'est aussi la période où les Amérindiens sont chassés du territoire séparé en deux zones : Indiens Caraïbes, à l'ouest les colons (ou François à l'époque) avec la zone des 50 pas géométriques actuelle en littoral pour défendre l'île. Des conflits éclatent, c'est le début de l'esclavage et du commerce triangulaire.

Le commerce de bois précieux se développe et des prélèvements de bois pour la construction appauvrissent rapidement la forêt.

Après l'abolition de l'esclavage en 1848, l'accroissement de la population, les défrichements à l'intérieur des terres s'accentuent. Les forêts sont exploitées jusque dans les endroits les plus inaccessibles. La prise de conscience de la richesse et de la fragilité de ce territoire par les pouvoirs publics intervient tardivement. La loi de départementalisation de 1946 voit la transformation du statut des forêts du domaine privé colonial en forêts départementalo-domaniales, gérées par l'administration des Eaux et Forêts. La gestion a alors pour objectif principal la conservation et la reconstitution des forêts pour mieux protéger le régime des eaux.

Une pépinière est ouverte en 1952 à la Donis pour y produire des plants de Mahogany et ainsi reboiser l'île. En 1977 le premier aménagement forestier de la forêt des Volcans (9.500 hectares) est publié. La forêt fournit le bois nécessaire à la construction, l'ébénisterie. Le Mahogany (Swietenia macrophylla) est l'essence phare de la sylviculture martiniquaise. Son bois précieux est très recherché pour son caractère tendre, facile à travailler, esthétique et durable.

Avec la création du Parc naturel régional de la Martinique en 1976 le rôle social de la forêt devient un enjeu fort pour le territoire. Les premiers aménagements du massif proposent des aires d'accueil du public, des sentiers balisés, des guides à l'attention des randonneurs. Le public prend également conscience de la richesse biologique de la forêt, la création des réserves biologiques répond également aux enjeux paysagers.