©Julien Triolo / ONF

Réserve biologique intégrale de Bois de Nèfles

La réserve biologique intégrale (RBI) de Bois de Nèfles se trouve en forêt départemento-domaniale des Hauts sous le Vent (974).

Localisation

  • forêt : forêt départemento-domaniale des Hauts sous le Vent
  • commune : Saint-Paul
  • département : La Réunion (974)
  • région : La Réunion

Identité

  • date de création : 20/05/1985
  • surface : 179 ha
  • catégorie UICN d'aire protégée : 1a
  • code national INPN : FR24REU02
  • code international Protected planet : 62780

Gestion

  • direction régionale ONF : La Réunion

La réserve biologique intégrale de Bois de Nèfles abrite un des derniers vestiges des forêts indigènes de montagne des hauts de l'ouest de La Réunion, dont la majeure partie a été autrefois défrichée pour la culture du géranium ou exploitée pour la production de bois. Située dans le cœur de parc national qui est lui-même inscrit au Patrimoine mondial de l’UNESCO, cette réserve est reconnue pour la beauté de ses paysages et la richesse de sa biodiversité. Elle fait partie d'un vaste massif forestier qui s'étend de Sans-Souci au nord jusqu'au Tévelave au sud, en passant par le Grand Bénare.

La réserve biologique de Bois de Nèfles est exposée à plusieurs menaces : invasions par le Longose et le Raisin marron, incendies de forêt, divagation de bovins. 

Plusieurs sentiers de randonnée traversent la réserve. Le plus emprunté mène les visiteurs jusqu'à l'Ilet Alcipe, un îlet (petit hameau) anciennement cultivé et habité en bordure de la réserve. Le sentier "Grand Bord" permet de rejoindre le Maïdo en longeant le rempart ouest du Cirque de Mafate, sur lequel il offre de magnifiques panoramas. 

Histoire

Le domaine forestier des Hauts sous le Vent a d'abord été propriété du roi de France, puis de la Compagnie des Indes et enfin de la Colonie. En 1948, un arrêté interministériel a donné la propriété de la plus grande partie de la forêt au Département. La forêt des Hauts sous le Vent, qui fait aujourd’hui 7585 ha, est composée de 87% de forêt départemento-domaniale et 13% forêt domaniale.

Historiquement, la zone a été largement défrichée pour l'installation d'aires d’élevage et pour la culture du géranium, tout en développant la sylviculture. Les incendies récurrents, parfois de grande ampleur, ont exacerbé l’invasion par certaines espèces allochtones pyrophiles comme l’Acacia noir (A. mearnsii, originaire d'Australie) et l’Ajonc d’Europe. La divagation des bovins a aussi contribué à la propagation des espèces exotiques envahissantes (EEE).

La RBI des Hauts de Bois de Nèfles a été créée dès 1985. Il s’agit d’une des premières réserves biologiques créées à la suite du rapport de Jean Bosser en 1982, portant sur la constitution d'un réseau de RB à La Réunion. Une vingtaine d'années plus tard, la qualité de conservation de cette zone, avec ses forêts de Tamarin des Hauts et de Bois de couleur) a contribué à justifier l'intégration du site au cœur du parc national (créé en 2007), par la suite classé au Patrimoine mondial de l'UNESCO (2010), reconnaissant son rôle essentiel pour la préservation de la biodiversité, la protection des sols, et pour la qualité de l'eau des bassins versants de l’ouest réunionnais et du lagon.

Géologie - Pédologie

La réserve de Bois de Nèfles se situe entre 1420 et 1781 m d’altitude, délimitée par les bords de remparts abrupts qui dominent le cirque de Mafate au Nord et à l’Est. Elle occupe une planèze, plateau basaltique relativement peu pentu mais entaillé par une alternance de crêtes et de ravines orientées est-ouest, avec des cours d'eau temporaires dont le débit peut varier fortement et rapidement : sèches d'avril à novembre et alimentées les mois suivants, de façon variable selon les années.

Le substrat géologique est essentiellement issu des éruptions du Piton des Neiges entre -230000 ans et -70000 ans. Le support de la végétation est composé majoritairement de tufs jaunes d'épaisseur variable (30 à 300 cm). Les sols développés sur ce substrat volcanique sont majoritairement des andosols, particulièrement sensibles à l’érosion. Dans la RBI notamment, on en trouve une variante appelée avoune, caractérisée par une litière épaisse et très acide issues de la dégradation de la litière de Tamarin des Hauts (Acacia heterophylla), de fougère et de branles (Erica sp).

Le Tamarin des Hauts est donc très étroitement lié à ce type de sol, mais il peut inversement présenter une menace pour l’intégrité de l’écosystème dans le cas d’incendies, du fait de sa capacité à propager le feu en sous-sol. 

Milieux naturels

Le climat de la RBI est caractérisé par des températures allant de 9 à 17°C en moyenne à 1600 m d’altitude, avec parfois même des jours de gel au-dessus de 1500 m. Les alizés venant de l'est et la réserve étant située sur le côté ouest de l'île, sous le vent, elle subit un effet de Foehn qui entraine des précipitations plutôt faibles. Mais celles-ci, à l'altitude relativement élevée de la réserve, sont compensées par une nébulosité importante, d’où le nom de "forêt de nuage".

Deux principaux types de végétation se trouvent dans cette forêt : forêt humide hétérogène de montagne à Bois de Couleur des Hauts dans le bas de la réserve, forêt humide de montagne à Tamarin des Hauts dans les parties hautes. Dans les deux cas, on rencontre de très vieux arbres aux diamètres et formes impressionnantes, témoins de plusieurs centaines d’années d’existence de ces forêts.

La présence de ravines est un atout en tant que réservoir de biodiversité mais peut aussi être favorable à la propagation d’espèces végétales exotiques envahissantes (EEE).

Flore

A l’occasion d'une étude sur les EEE dans la RBI, il a aussi été effectué un état des lieux de la flore indigène. 68 espèces ont été trouvées, dont 64% sont endémiques des Mascareignes et 39% strictement endémiques de La Réunion.

On trouve notamment 3 espèces rares et menacées : Stella manii, Koordersiochloa longiarista, et Tournefortia acuminata.

Faune

Les forêts de la RBi des Hauts de Bois de Nèfles abritent l’ensemble du cortège des oiseaux forestiers de La Réunion, à l’exception du Tuit-tuit. Ces 5 espèces sont endémiques et protégées : Zoizo la vierge, Tec tec, Merle pays, Zoizo vert et Zoizo blanc.

Le Papangue, dernier rapace endémique de La Réunion, a aussi été recensé sur la zone. Des observations de Faucon d’Eléonore et de Faucon concolore ont été faites sur le massif. Ces deux rapaces migrateurs quasi-menacés sont seulement de passage sur l’île ; les observations de ces espèces sont rares et précieuses pour approfondir leur connaissance.

L’entomofaune est particulièrement diversifiée mais le manque de connaissances à l’échelle de La Réunion sur ce groupe ne permet pas d’évaluer les menaces ; pour cette même raison, aucune espèce n’est protégée à l’heure actuelle.

Gestion

Bien que la réserve de Bois de Nèfles soit une réserve biologique intégrale (RBI), des actions ciblées de lutte contre des espèces exotiques envahissantes, sans porter atteinte à la végétation indigène, y sont conduites. L'objectif de gestion de la réserve est de maintenir un écosystème fonctionnel le plus préservé possible, ce qui justifie les travaux menés afin de limiter la progression des invasions biologiques.

En 2001, à la suite d’un incendie en partie haute de la réserve, des premiers travaux de reconstitution écologique ont été lancés, qui ont été achevés en 2011. En 2023, un état des lieux des invasions mené sur l’ensemble de la réserve a révélé une présence encore forte d'EEE par endroits, notamment le Longose et le Raisin marron. La lutte biologique contre cette dernière espèce, engagée depuis 2008, est malheureusement inefficace au-delà de 1000 m d’altitude, rendant nécessaire une lutte manuelle. À partir de fin 2023, des travaux ciblés de lutte contre cette espèce ont débuté dans 5 zones prioritaires (2 ha de surface au total). Ces travaux visent à protéger la forêt tout en permettant sa régénération et en limitant la propagation des invasions.

Le problème des espèces introduites concerne aussi des espèces animales qui sont une menace pour l'avifaune forestière endémique. Des actions sont menées contre les rats noirs, surmulots et chats qui s'en prennent aux nichées. 

L’ONF travaille aussi à impliquer divers partenaires dans les projets de gestion, tels que le Parc national, le CIRAD et le Conservatoire botanique national (CBN) Mascarin, afin de renforcer l'efficacité des actions menées.

Ressources