Sécheresse : quelles conséquences sur les ventes de bois ?

En 2018, la France subissait un épisode exceptionnel de sécheresse. Si un an plus tard, les conséquences sont visibles et préoccupantes dans les forêts, elles le sont aussi pour le secteur économique du bois. Explications.
Trois questions à Aymeric Albert, chef du département commercial bois à l’ONF.

Comment la filière Bois s’organise face à un épisode de sécheresse comme celui de 2018 ?

Face à ce phénomène, l’ONF a une double préoccupation : veiller à la préservation écologique des forêts publiques et organiser la valorisation du bois. La coupe des arbres touchés par la sécheresse est rendue nécessaire car elle favorise le renouvellement de la forêt. Mais cela se répercute sur le marché du bois et nous devons nous adapter, en concertation avec nos clients. Nous avons déjà connu de tels phénomènes avec, notamment, la canicule de 2003. Mais ce qui change aujourd’hui, c’est l’étendue des essences touchées. Les résineux blancs (épicéas et sapins) ne sont plus les seuls concernés puisque malheureusement cette année les hêtres ont beaucoup souffert.

Que deviennent les arbres touchés ?

Nos équipes interviennent selon une stratégie globale définie au niveau national et même régional. Les clients avec lesquels nous avons passé un contrat d’approvisionnement se sont engagés à accepter une part variable, dite "aléas". Cela signifie qu’ils pourront acheter une partie des essences en surplus, en particulier les épicéas qui ont été particulièrement touchés par les scolytes. Nous réorganisons aussi le marché pour approvisionner les régions en déficit de bois. C’est le cas, par exemple, de l’Ouest de la France. Depuis quelques années, ces régions manquent de bois à couper car les forêts sont encore en pleine régénération suite à la tempête de 2009. D’ordinaire, la production est destinée au marché local mais, dans le cas présent, la situation exige des ajustements.

Quelle est la conséquence directe sur le marché du bois ?

Cela se traduit par une hausse du volume de bois disponible sur le marché. La filière est donc saturée par un accroissement soudain de l’offre. Depuis le début de cette année, nous constatons une baisse du prix du bois. Et celle-ci risque de perdurer voire s’amplifier dans les mois à venir. À ce phénomène de saturation et de baisse des prix s’ajoute celui du déclassement. Il faut savoir qu’un bois touché par un phénomène lié à la sécheresse (stress hydrique ou parasite) perd 1/3 de sa valeur. En effet, généralement, il ne pourra plus être vendu pour le même usage. Par exemple, le bois destiné au départ à la construction ou à l’ameublement (ce qu’on appelle le "bois d’œuvre") pourra seulement être acheté pour l’industrie – il servira pour fabriquer du papier, des panneaux bois ou des palettes. Les plus touchés pourront servir de bois-énergie (chauffage au bois). Ainsi, au lieu d’avoir 2/3 de bois d’œuvre pour 1/3 de bois d’industrie comme en temps normal, la tendance s’inverse et les volumes de bois d’industrie sont en surplus.

Pour en savoir plus sur ce sujet

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