Épidémie de scolytes : quelles conséquences en Auvergne-Rhône-Alpes ?

Une épidémie de scolytes, insecte ravageur de l’épicéa, affecte le nord-est de la France et progresse vers la région Auvergne-Rhône-Alpes. Le nord de l’Ain est déjà touché. L’ONF et les communes forestières se mobilisent pour prévenir et gérer la crise.
Attaque de scolytes sur épicéas - ©Christian Pocachard / ONF

Une crise scolyte qui menace désormais la région Auvergne-Rhône-Alpes

Favorisés par la sécheresse particulièrement marquée de l'été 2018 et par les chablis des tempêtes hivernales, les scolytes se sont abattus dès la fin de l'été 2018 sur l’épicéa commun dans l’est de la France, notamment dans les plaines et les zones montagneuses de basse altitude. Les régions Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est ont été les premières touchées par le phénomène, qui s’étend à de nombreux pays européens : l’Allemagne, la Belgique, la Suisse, etc.

En Auvergne-Rhône-Alpes, si les attaques ont été plus nombreuses que les années précédentes en 2018 (notamment dans le Massif Central, dans l’Ain, en Isère et en Haute-Savoie), la situation n’est pas encore épidémique, excepté dans le nord de l’Ain (Jura). Néanmoins, la sécheresse de l’été 2018, qui s’est prolongée tout l’automne, et la douceur de l'hiver ont permis aux insectes de poursuivre leur développement même en hiver. L’expansion des foyers de scolytes se poursuit plus particulièrement sur les zones de basse altitude.

Les conditions météorologiques du printemps 2019 seront déterminantes sur l’évolution de la situation : un printemps humide et froid limitera l’envol et la reproduction future des insectes et favorisera la vitalité des arbres, alors qu’un printemps chaud et sec favorisera l’essaimage et l’attaque de nouveaux arbres en phase de stress. À noter : le sapin est également touché par des mortalités liées aux scolytes en liaison très étroite avec l'intensité du stress hydrique qu'il a subi.

Que faire pour limiter l’ampleur des dégâts ?

Pour éviter la propagation de l’épidémie, les seules solutions consistent :

  • à surveiller activement les peuplements, pour permettre une détection la plus précoce possible des arbres abritant encore des insectes. Elle est difficile à mettre en œuvre car les symptômes de présence de scolytes (trous de pénétration, sciure rousse) sont très discrets et souvent localisés en haut de l’arbre.
  • à couper les arbres infestés et à les sortir rapidement de la forêt.

L’ONF Auvergne-Rhône-Alpes expérimente l’utilisation et l’analyse de données satellite, à partir de massifs échantillons dans l’Ain, pour réaliser un suivi plus fin des dommages et obtenir l’évolution des zones touchées.

Les coupes sanitaires au sein des peuplements atteints par les scolytes font nécessairement évoluer les paysages, en particulier dans les zones fréquentées par le public. Mais la forêt se renouvellera de manière naturelle ou grâce aux plantations des forestiers de l’ONF, à partir d’essences diversifiées et adaptées au changement climatique.

La chaleur, facteur de prolifération des scolytes

Galeries creusées par le chalcographe - ©DSF

Les scolytes sont de petits coléoptères qui font partie des principaux ravageurs des forêts résineuses, en particulier d’épicéas. Ils se développent sous les écorces des résineux, entravant la circulation de la sève et entraînant la mort de l’arbre en quelques semaines. Différentes espèces existent et sont spécifiques d'une essence. Les scolytes débutent leur développement lorsque les températures dépassent 18 à 20°C. En 2018, la chaleur estivale et automnale a favorisé la succession de trois générations (au lieu de deux habituellement).

Tas de grumes de résineux - ©Alain Blumet / ONF

Des incidences sur le marché du bois d’épicéa et de sapin

L’ampleur du phénomène en France et en Europe a des conséquences sur le marché des résineux blancs, y compris avec une augmentation des importations de sciages. L’afflux de bois scolytés d’épicéa est particulièrement important dans les domaines de l’emballage et des coffrages, qui sont heureusement dans une dynamique forte.

Cet afflux concerne également les bois de charpente, les bois techniques reconstitués, ce qui perturbe les débouchés pour les bois massifs de la région Auvergne-Rhône-Alpes, sapins comme épicéas. Il faut donc s’attendre à une tendance à la baisse sur les cours des grumes en 2019, pour les résineux blancs.

En forêt publique d’Auvergne-Rhône-Alpes, l’ONF et les communes forestières anticipent une éventuelle expansion de l’invasion de scolytes : ils s’organisent pour évacuer et vendre au plus vite les bois malades, avant de commercialiser les bois sains, afin de rationaliser les moyens d’exploitation et de ne pas saturer le marché.

©DR

Un département dédié à la santé des forêts

Créé en 1989, le Département de la santé des forêts (DSF) est en charge de la surveillance sanitaire des forêts françaises de métropole. Pour assurer la protection et la qualité des forêts, le réseau de forestiers du DSF surveille les forêts, diagnostique les problèmes sylvosanitaires, aide et conseille les gestionnaires et les propriétaires.

Ce dernier suit l’évolution et l’impact des ravageurs des forêts et identifie les éventuels problèmes émergents. Les pôles régionaux du DSF sont hébergés au sein des Directions régionales de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (DRAAF).

Au niveau national, le DSF s’appuie sur un réseau de plus de 230 forestiers de terrain appelés correspondants-observateurs qui travaillent dans différents organismes. En Auvergne-Rhône-Alpes, onze personnels de l’ONF sont correspondants-observateurs du DSF.

Pour en savoir plus sur la santé des forêts
Consultez le bilan annuel du DSF ainsi que les dernières informations sur la crise scolyte.