Hérault : belles découvertes sur la bécasse des bois

Les équipes de l’Office national des forêts (ONF) dans l’Hérault, associées à l’Office français de la biodiversité (OFB), viennent de faire des découvertes intéressantes sur les mœurs et habitudes de la bécasse des bois, un oiseau typiquement forestier. Equipées de balises GPS/VHF, 20 bécasses ont été suivies de janvier à mars 2022 et ont révélé une mine d’informations sur leurs comportements.

La plupart des bécasses des bois émigrent pour hiverner dans les régions tempérées telle la façade Manche-Atlantique, là où la douceur et l’humidité sont censées leur assurer un hivernage optimal. L’espèce est aussi présente en période hivernale sur le pourtour méditerranéen. Il est alors intéressant de connaître ses stratégies d’hivernage dans cet environnement méditerranéen au vu de la sécheresse et des habitats présents.

Une étude réalisée entre 2019 et 2021 dans la partie sud de la région Auvergne Rhône-Alpes a essayé de répondre à plusieurs interrogations : ces milieux sont-ils réellement favorables à l’hivernage ? si oui, quelles sont les modalités et les stratégies individuelles des bécasses pour faire face aux conditions climatiques particulières ?

L’étude a été étendue ensuite plus au sud dans le département de l’Hérault, dans le cadre d’une convention passée en décembre 2021 entre le Réseau Bécasse de l’OFB et l’ONF pour assurer ensemble l’équipement et le suivi de 20 bécasses.

L'une des 20 bécasses capturées - ©ONF

Capture des oiseaux et équipement

Les captures se font la nuit, à l’aide de deux techniques :

  • la capture à la mare, à l’aide de filets verticaux tendus au crépuscule autour d’une mare où l’oiseau vient se baigner ;
  • la capture au phare qui consiste à prospecter avec un phare et une épuisette dans les milieux ouverts (prairies naturelle, vigne…) fréquentés de nuit par la bécasse.

Au cours de différentes sorties crépusculaires ou nocturnes réalisées entre le 22 décembre 2021 et le 4 janvier 2022 dans les Gorges de l’Hérault, il a été capturé 10 bécasses à la mare et 10 bécasses au phare.

Lors de ces captures, les oiseaux ont été équipés d’une balise GPS/VHF, bagués, pesés, leur âge a été déterminé et le prélèvement d’une plume a été réalisé pour analyse ADN ultérieure permettant de déterminer le sexe de l’individu (la bécasse ne présentant pas de dimorphisme sexuel).

Les balises utilisées couplent les technologies GPS et VHF :

  • le GPS permet d’avoir une position géographique précise qui peut être mémorisée par la balise à un pas de temps pré défini ;
  • le VHF permet, à l’aide d’une antenne radio, de localiser l’oiseau et, sans le recapturer, de télécharger à distance les données GPS stockées dans la balise.

Après ces captures et jusqu’à mi-mars 2022 il a été réalisé sur le terrain, quasiment toutes les semaines, le suivi de ces oiseaux (présence/ absence, géolocalisation, téléchargement à distance des données GPS stockées sur les balises, analyse SIG des données…).

En fin de saison, une partie des balises a pu être récupérée soit par recapture de l’oiseau vivant, soit sur des balises tombées au sol à la suite de la rupture d’une sangle ou d’une prédation.

L’analyse des données récoltées nous a permis de connaître, pour la période téléchargée, une partie de la vie de chaque bécasse : ses biotopes, stationnements locaux, éventuellement ses excursions plus lointaines avec retour sur le site d’étude.

Michel Martel, membre du réseau Avifaune et responsable du groupe Bécasse à l’ONF.

Les différents moments de la capture en images

Un oiseau voyageur fidèle à son site d’hivernage

La sècheresse hivernale exceptionnelle qu’a connue le département de l’Hérault (3 mm de pluie de début janvier à mi-février) a dû certainement confronter les bécasses à des difficultés d’alimentation. L’utilisation des balises a permis la connaissance de l’erratisme de quelques individus qui sont partis, parfois à 100 km de leur lieu de capture, pour rejoindre des zones plus humides.

Le fait étonnant a été que certains d’entre eux sont ensuite revenus dans les Gorges de l’Hérault alors que les conditions d’humidité y étaient toujours mauvaises. Ce retour, que l’on n’aurait pas imaginé, semble faire apparaître ainsi une fidélité extrême au premier site qu’ils choisissent au début de leur période d’hivernage.

En résumé, c’est pour moi et pour toute l’équipe, une étude et une aventure passionnante qui, grâce à l’évolution de la technologie, permet de découvrir en milieu méditerranéen une partie de la vie mystérieuse de cet oiseau si discret.

Michel Martel

Et après ?

Les données héraultaises ont été maintenant transmises à l’OFB pour être jointes aux données de l’Ardèche et de la Drôme. Elles seront ensuite analysées (activités des oiseaux, caractéristiques des milieux fréquentés…) par une étudiante de l’établissement AgroParisTech Nancy recrutée par l’OFB de Nantes en charge de l’étude globale. Un rapport de synthèse devrait être publié fin 2022.

Qui suis-je ?

©François Lecorguillé

Je suis la bécasse des bois (Scolopax rusticola) de la famille des Scolopacidés. On me reconnaît facilement grâce à quelques caractéristiques qui me sont propres : un long bec, des yeux hauts placés sur le crâne, un corps trapu, court sur pattes, d’une taille voisine de la perdrix grise (320 gr), un plumage de teinte "feuilles mortes", d'un brun-roux sur mes parties supérieures et par des zones plus claires barrées de brun foncé sur mes parties inférieures. L’homochromie avec le sol forestier est parfaite et me permet de miser sur mon mimétisme pour me cacher de mes prédateurs. 

Je suis un limicole forestier, principalement migrateur. Je suis surtout active au crépuscule et pendant la nuit pour aller chercher ma nourriture (zones de gagnage nocturne) dans les prairies naturelles, vignes… et je reste le plus souvent cachée en milieu forestier pendant le jour (remise diurne).

Plusieurs millions d’individus hivernent chaque année en Europe de l’Ouest et notamment en France entre les mois d’octobre et de février. Les bécasses migrent de nuit, généralement par petits groupes de quelques individus. Elles peuvent couvrir aisément 400 à 600 kilomètres en une seule nuit. Mais elles effectuent de nombreuses haltes migratoires et l’ensemble du parcours dure généralement plusieurs semaines. 

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