La réserve biologique intégrale du Gros Fouteau et des Hauteurs de la Solle bientôt inscrite à l’Unesco ?

Depuis 2007, le bien "Forêts primaires et anciennes de Hêtre des Carpates et d’autres régions d’Europe" est inscrit sur la liste du Patrimoine mondial de l'Unesco, qui reconnaît la valeur universelle et exceptionnelle de hêtraies réparties dans douze pays européens. Début 2020, la France a déposé un dossier de candidature pour neuf sites naturels, dont un situé en forêt de Fontainebleau.

Les ministères de la Transition écologique et de l'Agriculture, en lien avec l’ONF et Réserves Naturelles de France, se sont engagés à défendre la candidature de neuf hêtraies remarquables qu’ils considèrent comme étant des patrimoines naturels susceptibles de répondre aux critères de classement.

Ces neuf sites de la candidature française s’étendent sur 2 500 hectares et sont tous classés en réserves : six réserves biologiques, gérées par l’ONF, Gros Fouteau et des Hauteurs de la Solle (forêt domaniale de Fontainebleau), de la Sylve d'Argenson (Chizé), Saint-Pé-de-Bigorre (forêt domaniale indivise avec la commune éponyme), la Brèze (Aigoual), Sainte-Baume (Var), Chapitre Petit-Buëch (Gap Chaudun, Hautes-Alpes). Et trois réserves naturelles nationales : massif du Ventron (Vosges), Massane et Py (Pyrénées orientales).

Panneau de la réserve biologique intégrale du Gros Fouteau.

La réserve biologique intégrale (RBI) du Gros Fouteau et des Hauteurs de la Solle figure sur la liste des prétendants. Elle est un îlot de biodiversité choyé par tous les scientifiques. Située à Fontainebleau, elle est l’une des plus vieilles réserves intégrales de France. Créée en 1953, elle est une héritière des réserves artistiques qui avaient été protégées dès 1861, sous Napoléon III, à la suite de la demande des peintres de l’Ecole de Barbizon. Au cœur du massif, c’est un lieu de conservation unique évoluant librement depuis 150 ans.

De loin l’un des sites les plus exceptionnels qui soient en forêts de plaine par sa naturalité, l’empreinte de l’homme s’y fait rare. Seuls quelques scientifiques et forestiers parcourent ses sous-bois pour y étudier les champignons, mousses, insectes ou encore chauves-souris. Sous tous les angles, ils observent ce qu’il se passe quand on ne touche à rien.

Avec le temps, l’écrin boisé de cette réserve s’est densifié puis assombri. Par un processus naturel de maturation de la forêt, les chênes, préférant la lumière, disparaissent peu à peu, laissant la place aux hêtres, amateurs d’ombre. Tous ces arbres hébergent une biodiversité singulière, en jouant un rôle crucial dans le maintien de certaines espèces menacées. C’est le cas pour certains coléoptères qui ne vivent que dans les très vieux bois, ou d’oiseaux qui occupent leurs cavités.

Unesco et forêt de Fontainebleau : deux projets indépendants

La forêt de Fontainebleau concourt à l'Unesco à deux titres en parallèle, mais bien différents. D'une part, elle présente sa candidature au bien "Forêts primaires et anciennes de Hêtre des Carpates et d’autres régions d’Europe" pour sa seule réserve biologique intégrale du Gros Fouteau et des hauteurs de la Solle. D'autre part, elle candidate au patrimoine mondial de l'Unesco sur toute la forêt domaniale (le château de Fontainebleau est déjà classé à l'Unesco depuis 1981). Plus d'informations ici !

 

Evaluation du bien par l'UICN

Intégrer la prestigieuse liste du Patrimoine mondial de l’Unesco requiert plusieurs étapes. Du 4 au 7 janvier 2021, les porteurs de la candidature des neuf sites français passaient donc leur "grand oral". A cause du contexte sanitaire, seuls trois sites ont pu faire l’objet d’une visite approfondie sur le terrain, dont celui du Gros Fouteau et des Hauteurs de la Solle.

La visite de l'experte de l'UICN pour le Patrimoine mondial en RB de Fontainebleau en janvier 2021. - ©ONF

Pour l’occasion, une experte de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) s’est rendue à Fontainebleau mardi 5 janvier 2021. Elle a été accueillie par le ministère de la Transition écologique, les équipes de l’agence Île-de-France Est et de la direction générale de l’ONF, en présence de représentants de la municipalité de Fontainebleau et des principales associations locales (Association des Amis de la Forêt de Fontainebleau (AAFF) et Association des Naturalistes de la Vallée du Loing et du massif de Fontainebleau (ANVL). 

L'experte a pu apprécier la richesse écologique et paysagère du lieu, mais aussi les mesures mises en œuvre par l’ONF qui visent à conserver et valoriser ce patrimoine. Après cette étape déterminante, l’UICN émettra un avis, qui sera suivi d'une délibération du Comité du Patrimoine mondial de l’Unesco.

Au regard du nombre de pays et de sites concernés (une trentaine de forêts) par la procédure d'évaluation en cours, la décision finale devrait intervenir en 2022. 12 pays participent au classement de bien "Forêts primaires et anciennes de Hêtre des Carpates et d’autres régions d’Europe" de l'Unesco : Albanie, Allemagne, Autriche, Belgique, Bulgarie, Croatie, Espagne, Italie, Roumanie, Slovénie, Slovaquie, Ukraine.

Le hêtre en quelques mots

Hêtraie de plaine - ©Nathalie Petrel / ONF

Arbre majestueux, reconnaissable à son écorce lisse et grise, le hêtre avait été repoussé à l’extrême-sud des confins européens il y a 12 000 ans, avant d'entamer son retour vers le nord à la fin de la dernière ère glaciaire, pour coloniser progressivement une grande partie du continent. Environ 2000 ans avant notre ère, le hêtre était encore surtout présent dans les Appenins, dans les Pyrénées, dans les Balkans et en Grèce, d'où il a entrepris sa reconquête. De nos jours, poussé par les températures plus chaudes, son expansion se poursuit vers le nord de l’Europe. Très présent en France, le hêtre y couvre près de 10% des forêts. Toutefois, sensible à la sécheresse et aux vagues de chaleur, il est considéré dans notre pays comme une des essences les plus exposées au changement climatique.

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