Renouvellement forestier, la mobilisation continue
France Relance : priorité au renouvellement curatif
Entre son lancement en décembre 2020 et la fin 2023, le plan France Relance a constitué une première réponse d’envergure. Avec une enveloppe de 60 millions d’euros, il a permis le renouvellement de 11 054 hectares dans 541 forêts domaniales, dépassant de près de 10% l’objectif initialement fixé.
Face aux ravages des scolytes, de la chalarose ou encore de la maladie de l’encre, l’accent a été mis sur les régions les plus durement touchées. Ainsi, 55% des surfaces ont bénéficié d’un renouvellement curatif, permettant de replanter des zones décimées par les crises sanitaires. Le reste des interventions (45%) s’est concentré sur la prévention, en renforçant la résilience des peuplements face aux aléas climatiques. Les plantations en plein ont représenté 32% des surfaces, le reste étant constitué par des enrichissements fins ou en placeaux. Le Grand Est a été la région la plus concernée (23% des surfaces replantées), devant les Hauts-de-France et la Bourgogne-Franche-Comté (15% chacune), suivis par la Nouvelle-Aquitaine, la Normandie et l’Auvergne-Rhône-Alpes (9% chacune).
Sur le terrain, cette dynamique s’est traduite par la plantation de plus de 8,8 millions d’arbres, issus de 98 essences différentes. Feuillus et résineux ont été répartis de manière équilibrée, où le chêne reste prépondérant avec 25% des plants de cette essence, et une place croissante accordée aux essences méditerranéennes, mieux adaptées aux conditions climatiques de demain.
LEXIQUE
Enrichissement : plantation qui vient compléter une surface en régénération naturelle.
Plantation en placeaux : plantation dense sur des petites surfaces, par exemple lorsque la régénération naturelle ne recouvre pas l’ensemble de la surface espérée, ou sur terrain accidenté.
Plantation en plein : plantation sur une surface à nu avec un espacement régulier entre les jeunes plants (de 2 m à 3 m) afin de limiter les phénomènes de concurrence entre les individus.
France 2030 : cap sur l’adaptation des forêts
Lancé en 2023, le programme France 2030 a poursuivi l’effort avec une approche résolument tournée vers l’avenir. Destiné au renouvellement de 5 000 hectares, il marque un tournant en privilégiant l’adaptation des peuplements aux nouvelles conditions climatiques. Le changement le plus notable concerne les modes de renouvellement. Les renouvellements par régénération naturelle accompagnée, favorisant des essences secondaires lorsqu’elles sont adaptées aux conditions futures, sont devenus un levier clé et représentent 20% des surfaces concernées. Les dispositifs de diversification en gestion et l’expérimentation des îlots d’avenir, définis selon la réglementation en vigueur des matériels forestiers de reproduction, ont été maintenus afin de tester de nouvelles approches
France Nation Verte : une ambition renforcée pour la résilience des forêts
En 2024, l’État franchit une nouvelle étape avec le lancement de France Nation Verte, un dispositif inscrit dans la planification écologique. Il a pour objectif de financer le renouvellement de 7000 hectares de forêt domaniale. Au-delà de l’objectif de régénération naturelle adaptée aux conditions climatiques futures, qui reste une priorité, ce programme introduit une autre dimension: le financement des travaux sylvicoles d’amélioration des jeunes peuplements pour renforcer leur résilience.
Avec ce nouveau dispositif, l’État affirme sa volonté d’accompagner durablement le renouvellement des forêts françaises en conciliant restauration, adaptation et anticipation des défis climatiques à venir
Le rôle crucial des agences travaux
Regroupant l'ensemble des équipes de l'ONF chargées de réaliser les activités (manuelles et mécaniques) relevant du régime forestier, les agences travaux ont accentué, durant l’année, la priorité donnée aux prestations sylvicoles sur les plantations et les entretiens dédiés aux opérations de régénération forestière dans le cadre des trois dispositifs financés par l’État (France Relance, France 2030 et France Nation Verte). Les entretiens (cloisonnements, dégagements) ont été effectués sur près de 85000 hectares, avec leurs moyens de production internes et le recours, en sous-traitance, aux entreprises de travaux forestiers. Grâce au soutien de l’État, ces activités sont amenées à augmenter significativement dans les années à venir. Les agences travaux ont également produit un effort d’investissement en direction des activités Graines et plants avec la sécherie de la Joux, la pépinière de l'Essart et les vergers à graines de La Réunion et du Sud-Ouest, afin de répondre à la demande croissante de graines et de plants adaptés au climat futur.
LEXIQUE
Îlots d’avenir : dispositif d’expérimentation sur de petites parcelles de 0,5 à 2 hectares, constituées d'une seule essence, dont les capacités d’adaptation au milieu et d’évolution sont suivies et analysées en continu par les experts du département Recherche, développement et innovation de l’ONF.
Matériel forestier de reproduction : plants de feuillus ou de résineux élevés en pépinière, graines, boutures, greffons et marcottes.
Dispositif de diversification en gestion : expérimentations permettant de tester, dans le cadre de la gestion forestière, de nouveaux mélanges entre essences d’arbres connues, le plus souvent autochtones, et de nouvelles espèces, autochtones et étrangères. Les décisions sur la reconnaissance à large échelle seront prises seulement après la phase d’expérimentation, qui peut durer de 30 à 50 ans.
Renouvellement forestier en Guadeloupe
En 2024, grâce au soutien de l’État, l’ONF a lancé des projets ambitieux en Guadeloupe, visant à restaurer et protéger les écosystèmes forestiers menacés par le changement climatique.
En 2024, l’ONF a conclu deux conventions visant à réaliser des travaux de renouvellement forestier dans les forêts domaniales, départementalo-domaniales ou territorialo-domaniales d’outre-mer aux Antilles, à La Réunion, à Mayotte et en Guyane. La première, signée fin janvier dans le cadre de France 2030, prévoit un financement de cinq millions d’euros. La deuxième, signée en septembre dans le cadre de la Planification écologique (avec le ministère de l’Agriculture), est dotée d’une enveloppe de 3,5 millions d’euros. Ces accords permettent notamment d’intervenir en Guadeloupe sur 16 hectares de forêt déjà affectés par les conséquences du changement climatique (montée des eaux, sécheresses, cyclones) ou menacés par les pressions humaines, afin de préserver les services écosystémiques des forêts.
Des premières plantations effectuées
Les travaux sont variés : ils comprendront des reboisements avec une diversification des essences locales (plantations en plein ou enrichissements), ainsi que l'accompagnement de la régénération naturelle dans des zones dégradées à la suite d’événements climatiques (glissements de terrain, érosion des berges ou des talus) ou fragilisées par la fréquentation. Ces interventions concerneront aussi bien la forêt sèche sur sable et la forêt marécageuse de la forêt domaniale du littoral, que la forêt dense humide ou mésophile de la forêt départementalo-domaniale. Plus ponctuellement, les travaux engagés pourront viser le renforcement de la dynamique végétale naturelle dans des parcelles de production de mahogany (aussi appelé «acajou des Antilles», le mahogany grandes feuilles fait partie des essences de bois précieux).
L’ONF s’approvisionne auprès de pépiniéristes privés pour disposer des plants d’essences locales. À la fin de l'année 2024, après avoir priorisé les parcelles nécessitant des interventions en fonction des enjeux écologiques et lancé les marchés de production des plants, les premières plantations ont été réalisées en forêt domaniale du littoral. Elles se poursuivront en 2025.